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 Les Possédés

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Haya Sasaki

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MessageSujet: Les Possédés   Les Possédés EmptyJeu 5 Nov - 19:48

Haya avait rapidement compris que sa promotion en tant que chuunin allait avoir des effets extrêmement bénéfiques.

D’un côté, les permissions. Elle pouvait virtuellement voyager où elle le désirait, sans seulement compter sur les missions. Si elle désirait se rendre à Kumo, elle pouvait demander une permission spéciale. Mais cela était un petit peu tendu administrativement, d’après ce qu’elle avait compris. Cependant pour tout ce qui ne concerne pas à village ninja, il n’y avait presque aucune restriction. Elle pourrait ainsi quadriller le pays sans avoir spécialement de comptes à rendre à qui que ce soit et sans devoir s’absenter pour plusieurs semaines. En effet, le village ne l’autoriserait pas à être inopérante aussi longtemps. Cela, pour l’instant, ne représentait pas un problème insurmontable : l’homme qu’elle cherchait pouvait tout aussi bien se trouver à Uke ou dans ses environs. Elle laisserait ceux qui ont plus de possibilités (Hyô, Satoshi, la flamme jaune) s’occuper des territoires plus éloignés. Peut-être qu’un jour il faudra qu’elle se penche sur la question et trouve une parade, mais il ne s’agissait pas d’une urgence.

De l’autre côté, son emploi du temps était (toujours virtuellement) beaucoup plus souple. Rien n’oblige réellement un aspirant ou un genin à se rendre à l’académie, les cours sont constants, on peut les choisir. Mais si un genin ne progresse jamais… en étant chuunin, une partie de la progression était déjà finie, les bases étaient posées et il ne restait plus qu’à se spécialiser. Et cela s’intégrait à merveille dans les projets d’Haya.

Car cela lui donnerait l’opportunité de suivre un entraînement rigoureux en compagnie des meilleurs qu’elle pourrait trouver, sur une certaine durée.

Koshiro et Benihime lui avaient donné rendez-vous à l’endroit habituel où la flamme jaune s’entraînait. Haya s’assit par terre et attendit tranquillement, les jambes étendues dans l’herbe à profiter de la brise qui se levait. Elle ne savait pas exactement en quoi consisterait la journée, car si elle avait un plan global sur les points à travailler, elle ne disposait pas réellement de ligne définie.

Haya ne patienta toutefois pas longtemps. Elle avisa trois silhouettes au loin, dont une qu’elle ne reconnaissait pas à mesure qu’elle approchait. Elle se releva et les salua d’un signe de tête à leur arrivée.

Benihime - Salut Haya.

Koshiro - Yo.

La personne qui les accompagnait était une fille, un peu plus âgée que Benihime. Haya lui donnait vingt ans. Elle était fluette, avec d’étranges cheveux aux reflets bleutés et de grands yeux de la même couleur. Elle dévisagea Haya, les mains derrière le dos et légèrement penchée en avant, comme si on lui présentait un puzzle subtil qui excitait doucement son intérêt.

Haya - Salut.

Benihime posa sa main sur l’épaule de la jeune femme.

Benihime - La copine de Ko !

Koshiro - Qui a un nom....

Benihime sourit.

Benihime - Oui mais je préfère souligner la tension sexuelle qui existe entre vous pour ne pas mettre Haya mal à l’aise.

Haya - Charmante attention, murmura-t-elle tout bas.

La jeune femme sourit à son tour et tendit une main qu’Haya serra.

Saeka - Je suis Saeka ! Enchantée. Ko m’a dit que tu avais peut-être besoin de moi.

Haya consulta Koshiro du regard, qui acquiesça sobrement.

Koshiro - Ryosen m’a dit que tu craignais un peu avec ta chaîne. Saeka peut sans doute t’aider à apprendre à bouger avec elle et à la rendre plus efficace.

Haya - Oh ! Ma chaîne… bien sûr. Je ne m’en sers presque jamais en fait. Et quand je m’en sers…

Benihime - Elle est nulle avec, quoi.

Haya - Voilà.

Saeka se redressa et renouvela son sourire.

Saeka - Très bien ! Ce n’est pas un problème. Je pense pouvoir t’aider.

Haya - Oh, merci.

Benihime se frotta les mains et jeta des regards alentours.

Benihime - Alors c’est entendu. Pendant ce temps, je vais me dérouiller un peu contre Ko. Cela fait un moment qu’on ne s’est plus mis dessus !

Elle s’interrompit un instant, avec sur le visage un air qui indiquait qu’elle avait tout fait pour finir sa phrase comme ça.

Benihime - Au sens figuré, bien sûr ! Moi et Koshiro on ne se met pas vraiment sur... Il n’y a absolument rien de…

Koshiro - Je crois qu’on a saisi on se situait l’erreur…

Benihime ricana en s’éloignant, sous le regard vaguement interrogateur de Saeka. La jeune femme resta silencieuse un moment, puis secoua à peine la tête et se concentra sur Haya.

Saeka - Montre moi ce que tu sais faire avec ta chaîne, d’accord ?

Haya - Bien sûr.

Cela risquait d’être plutôt court et Haya ne fut pas déçue. Elle sortit sa chaîne, l’envoya sans grâce particulière sur son adversaire qui s’écarta avec comme de la négligence dans les jambes et regarda impassible la chaîne s’enfoncer au sol, puis revenir vers Haya. Saeka releva la tête, l’air de dire « C’est tout ? » et Haya résista à la tentation de hausser les épaules. C’était à peu près tout oui. Elle préférait ne pas se risquer à faire tournoyer sa chaîne autour d’elle, la dernière fois qu’elle s’y était essayée seule la résistance de son armure lui avait permis de ne pas se blesser toute seule, sous l’œil interdit de Benihime (qui n’avait même pas osé se moquer tellement c’était évident).

Saeka - Heu…

Haya - Oui ?

La jeune femme se passa une main derrière la nuque.

Saeka - Je crois que j’ai vu des étudiants plus doués que ça, en fait.

Haya - Ha… ha… ha… Présente les moi à l’occasion…, maugréa-t-elle tout bas.

Les lèvres de Saeka s’étirèrent en un franc sourire et elle hocha énergiquement la tête.

Saeka - Mais ton cas n’est pas désespéré ! Dans trois semaines environ, je pense que tu pourras reconsidérer ta chaîne comme autre chose qu’un handicap.

Haya acquiesça et rejoignit Saeka, sa chaîne toujours dans les mains, comme un grand serpent mort dont elle ne saurait pas exactement quoi faire. La jeune femme aux curieux cheveux l’attrapa par la main et la tira sur plusieurs mètres d’un pas vif, sans qu’Haya ne parvienne à déterminer une direction précise et justifiée. Il y avait toujours aussi peu d’arbre, l’humidité était toujours la même, mais elle ne perdait rien à la suivre.

Saeka - Alors dis-moi, qu’est-ce que la chaîne pour toi ?

Haya - Pardon ?

Saeka - Bien, qu’est-ce que ça t’évoque !

Haya chercha rapidement dans sa tête voir si elle avait une réponse intelligente à proposer mais comme ce n’était pas le cas, elle finit par lâcher avec quelques hésitations :

Haya - C’est ce que j’utilise quand je n’ai plus de chakra ?

Saeka - Ah ! Du soutien donc. Tu peux te permettre d’être un peu nulle dedans alors. Si tu m’avais dit que c’était ta raison de vivre, nous aurions eu beaucoup plus de travail !

Haya ne chercha pas à la contredire. Elles s’arrêtèrent plus proche des berges qu’elles ne l’étaient, et elles pouvaient toujours voir Benihime combattre Koshiro, à même le lac, trop loin pour qu’elles entendent quoi que ce soit.

Haya - C’est la raison de vivre de certaines personnes ?

Saeka - Bien sûr. La mienne par exemple. Est-ce que tu connais un peu le kido ?

Haya - Heu, je devrais ?

Saeka sourit.

Saeka - Si tu étais originaire de kiri, sans doute oui. Viens, on va s’asseoir et après, promis, je t’aiderai.

Haya s’exécuta et retrouva la douce sensation de l’herbe sous ses doigts. Saeka lui demanda la permission de prendre sa chaîne, qu’elle regarda avec soin et laissa reposer sur ses genoux.

Saeka - Avant les villages ninja, il y avait les samouraïs. Ils avaient le même rôle que nous actuellement, même si les frontières n’étaient pas les mêmes : protéger les pays. Ils n’utilisaient pas nos techniques, qui sont apparues beaucoup plus tard après des décennies et des décennies de recherche. Mais ils utilisaient les outils, les armes, et je peux te dire qu’aujourd’hui ni jamais on les maniera aussi bien qu’eux. J’appartiens à la caste du feu… spécialisée dans la chaîne, justement.

Haya - Oh. Je pensais que les samouraïs n’utilisaient que les katana.

Saeka eut un sourire qu’Haya qualifierait d’indulgent.

Saeka - Pas du tout, ils utilisaient de tout, chaque caste ayant son enseignement. Mais être ninja et suivre un enseignement de samouraï n’est pas facile, je ne progresse pas aussi bien que je le voudrais et… enfin, ce n’est pas facile.

Haya - Et pourquoi les kiréens sont censés connaître cela ?

Saeka - Kiri doit son nom à l’un des sept épéistes. Ils utilisaient le kido ou, en tout cas, ils utilisaient leurs armes avec plus de conviction que la plupart des ninjas. C’est pour cela que c’était un symbole, et que ça l’est toujours d’ailleurs. Alors, tout le monde sait un petit peu ce qu’il doit au kido et aux samouraïs, même si ce n’est pas aussi simple.

Haya ne connaissait pas grand-chose au sujet de la fondation de kiri. Elle savait, plus ou moins, que c’était le nom de quelqu’un, le premier Mizukage, mais passé cela c’était le flou total. A plusieurs reprises pourtant elle s’était intéressée à l’histoire du village, mais elle y allait progressivement et sans suivre l’ordre logique et chronologique. Elle s’intéressait à certaines personnalités qui, comme elle l’avait appris, avaient pour certaines côtoyées son père. Et c’était peut-être ce qui les rendait si intéressantes à ses yeux. Mais pour elle, Kiri remontait à trop loin dans l’histoire, une zone sur laquelle elle ne s’était pas encore penchée. Et les samouraïs… elle savait à peine qu’ils avaient réellement existés… tout cela remontait à si loin.

Saeka - Je n’ai pas le niveau suffisant pour t’enseigner ce que je sais, mais pour utiliser ta chaîne en soutien, je pense que je peux t’aider en peu de temps. C’est une arme plus intéressante, pour toi en tout cas, d’après ce que je sais de ton style, que le katana. Si tu me permets de te donner quelques conseils, je pense que tu devrais également te fournir à l’avenir quelques aiguilles ou des kunai, car ils te seront tout aussi efficaces quand tu devras économiser ton chakra.

Haya acquiesça. Elle n’avait jamais bien réfléchi à ses dépenses, se focalisant principalement sur sa veste et sur sa protection. A ses yeux, les armes étaient accessoires, même si visiblement il y en avait certaines de particulièrement puissantes. Ce n’était pas quelque chose qui l’intéressait plus que cela, pour elle la pertinence d’une arme se bornait à lui sauver la vie quand elle n’avait plus rien sous la main et à cet égard, une chaîne faisait aussi bien le travail qu’une casserole.

Saeka - La chaîne te permettra en effet de rester à distance, mais de ne pas interrompre ton geste si tu venais à être engagée. Ainsi, tu ne perds pas de temps et tu peux réagir de la façon la plus appropriée. Il te faudra toutefois l’utiliser intelligemment pour ne pas qu’elle se retourne contre toi, car un mouvement trop lent peut être intercepté par un adversaire tandis qu’un mouvement trop rapide manquera sa cible si tu n’y prends pas garde.

Un point pour la chaîne, zéro pour la casserole.

Saeka lui tendit la chaîne, un large sourire aux lèvres.

Saeka - On commence quand tu veux, Haya.
Haya Sasaki

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MessageSujet: Re: Les Possédés   Les Possédés EmptySam 7 Nov - 14:51

Haya attrapa ses deux genoux, haletante, sa chaîne tendue entre ses doigts tremblants.

Saeka était du genre… mortellement rapide et cela en devenait mortellement ennuyeux. Elle ne faisait aucun effort pour être ne serait-ce que vaguement inquiétée par les mouvements d’Haya et se contentait d’esquiver avec une facilité insolente ses moindres tentatives. Les efforts déployés par Haya rencontraient difficilement un écho auprès de Saeka, qui l’observaient souffler (comme un bœuf), l’air intriguée.

Saeka - On fait une pause ?

Mais va mourir…

Haya se redressa en tâchant de conserver la bouche fermée malgré son envie terrible d’avaler le plus d’air possible. Néanmoins, le rouge de ses joues ne saurait mentir ; elle était épuisée après une heure de vaines tentatives, toutes plus misérables les unes que les autres. Saeka sourit.

Saeka - Je t’ai dit, cela prendra au moins trois semaines avant que tu parviennes à produire des choses intéressantes. Pour l’instant, j’aimerais que tu t’habitues au contact de ta chaîne, que tu prennes conscience de son amplitude, de l’espace qu’elle occupe, et que cette espace devienne le tien. Comme une extension gigantesque de ton corps.

Haya sentait bel et bien sa chaîne. Elle pesait si lourd actuellement qu’elle devait faire un effort important sur elle-même pour ne pas la lâcher et continuer à grands coups de jet d’eau. Voilà une méthode de combat raisonnable. Au lieu de s’agiter comme un malheureux pantin désarticulé qu’on prendrait un malin plaisir à secouer.

Haya - Tu sais… je sens… très bien… la chaîne...

Nouvel essai pour que Saeka passa à autre chose, mais il n’en fut rien. La journée se poursuivit sur le même rythme, avec des pauses de plus en plus rapprochées. Haya avait un douloureux point de côté, à cause de sa respiration tout à fait irrégulière et maintenant le soleil était invisible derrière les arbres, au loin. Le ciel se rosissait lentement quand Benihime et Koshiro les rejoignirent. Benihime avait l’air vaguement boudeuse, Haya en déduisit que leur dernière passe d’arme n’avait pas été à son avantage et qu’elle avait décidé unilatéralement d’arrêter la séance d’entraînement, mettant cela sur la luminosité qui baissait. Elle l’avait vue faire plusieurs fois. Koshiro était peut-être un peu trop endurant pour elle, mais c’était un concept qu’elle refuserait d’admettre jusqu’à son dernier souffle.

Koshiro avait la délicatesse de ne pas s’en soucier plus que cela.

Koshiro - Vous avez fini ? On va manger nous.

Benihime - Ah… Moi je n’ai pas assez bougé pour avoir faim. Je suis en pleine forme !

Koshiro - Tu viens de dire que tu mangerais un cheval si tu en...

Benihime - Tu sais, les femmes parlent quand elles s’ennuient.

Saeka - Nous n’avons pas terminé encore.

Haya - On a difficilement commencé…

Benihime - Tu m’étonnes. Je te voyais au loin et ça me faisait rire.

Koshiro - Tu utilisais cette excuse quand je te touchais…

Benihime - Bref. Vous nous rejoignez ? On va… comme d’habitude… A tout à l’heure !

Elle s’éloigna à grandes enjambées. Koshiro hocha la tête.

Koshiro - Poussée par son estomac.

Benihime - J’ai entendu !

Il embrassa Saeka et s’éloigna à son tour.

Koshiro - A tout à l’heure alors. Bon courage.

Haya espérait qu’il ne s’adressait pas à elle spécialement, parce que son courage était définitivement enterré sous ses pieds. Saeka dit au revoir à son petit ami et se retourna vers sa jeune et misérable apprentie. Elle ne semblait pas totalement lassée par ses piètres performances et peut-être même, d’une façon incompréhensible et fascinante, plutôt intéressée et enthousiaste.

Saeka - Tu maîtrises bien le chakra non ?

Haya - Je fais du ninjutsu oui.

Saeka - Mais tu en fait bien, n’est-ce pas ? C’est ce que me disais Ko.

Haya acquiesça.

Haya - Je me débrouille.

Saeka posa un doigt fin sur ses lèvres, toute à sa réflexion. Elle finit par lâcher un nouveau sourire.

Saeka - Bien, alors tu vas utiliser ton chakra avec ton arme.

Haya - Mm... je vois comment faire ça, mais je ne vois pas dans quel but.

Saeka - Pour frapper plus fort et plus vite, bien sûr. Tu n’es pas encore, pardonne-moi, physiquement au point. Mais en t’appuyant sur le chakra, tu pourras te donner une qualité supplémentaire dans l’exécution, une qualité que tu apprendras à copier avec le temps même sans chakra. Tu triches un peu, pour habituer ton corps à cette vitesse et à cette puissance et, progressivement, tu n’auras plus besoin de chakra. Comme… des béquilles, par exemple.

Des béquilles… Haya en avait porté des mois durant. Elle allait en cours sur ses deux béquilles, lorsque la douleur était importante mais pas insupportable au point de la clouer au lit. Quand par hasard la douleur s’atténuait, Haya pouvait se déplacer sans l’aide de béquille mais elle était toujours un peu angoissée car parfois, le mal surgissait brusquement et la foudroyait sur place. Dans son placard, il y avait toujours ces deux béquilles qu’elle n’avait plus utilisées depuis plusieurs mois maintenant. Ses vieilles douleurs routinières étaient derrière elle maintenant, mais pas ce qui les avait causées.

Tout cela se dressait toujours face à elle, inébranlable, jusqu’au jour où elle viendrait faire bourdonner la ruche d’un grand coup de pied. Ce jour-là, son espérance de vie se réduirait à un simple fil. Elle pencherait d’un côté, puis de l’autre, au gré des mouvements de ses alliés, de ses adversaires et d’elle-même. Quand tout le monde saurait de qui elle était la fille, la ruche bourdonnerait à s’en exploser les tympans et elle serait prête à danser sur les conséquences jusqu’à la vérité finale, la seule qui importe et celle qui valait de prendre ces risques.

L’importance des béquilles… Ce n’était assurément pas quelque chose qui lui était inconnu.

Haya - Très bien. Je pense pouvoir faire cela.

Saeka - Parfait. Voyons voir un peu comment tu bouges avec l’aide de ton chakra.

Haya se retint de la prévenir de ne pas s’attendre à un changement extraordinaire. Peut-être que son chakra pouvait légèrement influer sur la vitesse d’exécution de son bras et sur sa puissance brute, mais il lui semblait improbable que cela fasse une réelle différence. Saeka évitait ses attaques avec trop d’aisance pour être gênée par un léger mieux. Il lui faudrait quelque chose de beaucoup plus déterminant, mais pourquoi ne pas essayer, après tout ?

La jeune fille dispersa son chakra à travers son corps et le concentra dans ses bras, qui tenaient tous deux la chaîne fermement bien qu’un léger tremblement d’épuisement les agitait toujours. Elle fit tournoyer son arme avec lenteur (pas pour faire du style, mais parce que plus vite elle s’emmêlait avec et risquait de s’ouvrir le crâne bêtement), sans quitter la silhouette bleutée de Saeka. Un peu de son chakra se faufila sur la chaîne elle-même, qui se mit à luire de l’habituel éclat bleu. Haya se sentait peut-être très légèrement plus à l’aise avec son arme dans les mains, qui ne lui apparaissait plus comme une sorte de gros fil embrouillé mais comme quelque chose capable de blesser Saeka, un instrument qui pouvait l’aider à tuer.

Elle projeta la chaîne sur la jeune femme, qui l’esquiva avec la même agilité qu’auparavant, mais Haya tendit son corps et imprima un léger mouvement du poignet pour modifier la trajectoire de la chaîne en plein vol. A sa propre surprise, l’arme répondit favorablement au mouvement et fila sur Sakae avec une vigueur nouvelle. La jeune femme para avec son poignet nu, se ramassa sur elle-même et fonça sur Haya avec, celle-ci n’en doutait pas un seul instant, la ferme intention de la mettre hors d’état de nuire.

Haya tira sur sa chaîne de toutes ses forces alimentée par son chakra presque intact, elle devina l’éclat métallique de l’arme et Sakae se baissa à terre pour éviter d’être effleurée. Haya ne pouvait concevoir qu’on puisse être aussi près du sol et continuer à courir pourtant. Cette réflexion fut d’ailleurs la dernière qu’elle eut avant que Sakae ne la percute de tout son petit poids, beaucoup plus important qu’Haya ne l’envisageait. Les deux filles furent projetées à terre et Haya se reçue douloureusement sur le dos, pantelante.

Elles restèrent là quelques secondes, puis Sakae se mit sur les genoux.

Saeka - Tout de suite plus stimulant ! Il faudra recommencer demain, mais on tient quelque chose d’intéressant.

Elle se redressa et tendit une main qu’Haya saisit, avant de se frotter les jambes pour en ôter la terre. La jeune fille ramassa sa chaîne et l’enroula avant de la fixer à sa ceinture, comme elle le faisait d’habitude.

Haya - Merci de prendre ton temps pour m’aider. Ce ne doit pas être très amusant.

Saeka l’attendait pour repartir en direction de Kiri, dont les palissades apparaissaient uniquement grâce aux lumières nocturnes

Saeka - Il n’y a absolument aucun problème. Ko m’a dit que tu avais besoin de moi, alors si je peux être utile…

Haya - Il t’a dit pourquoi ?

Elles prirent la direction du petit sentier qui les ramènerait à kiri, après une pente qu’Haya espérait être capable de gravir sans se mettre à ramper. Ce ne serait pas très digne mais le corps n’était pas naturellement porté vers la dignité.

Saeka - Pas exactement non. Mais j’ai une totale confiance en lui. Il n’aiderait pas quelqu’un qui n’en a pas besoin véritablement ce n’est juste… pas son genre.

Haya acquiesça. Elle ne souhaitait pas réellement aborder les raisons qui la poussaient à être présente ici ce soir, mais Sakae semblait ne pas désirer la pousser plus que cela. La pente ne fut pas un obstacle aussi inhumain que l’aurait pensé Haya et en réalité, elle ne se rendit compte de l’avoir dépassé que plusieurs secondes après.

Haya - Tu as quel âge ?

Saeka - Vingt-trois. Pourquoi ?

Haya - Pour rien, tu fais plus jeune.

Saeka rit.

Saeka - Il paraît oui ! Et toi ?

Haya - Dix-sept ans.

Saeka - Tu fais plus vieille.

Haya - Heu… il paraît, oui.

Lorsqu’elles entrèrent dans le petit restaurant dont lequel la flamme jaune se retrouvait habituellement après ses longs et pénibles entraînements, elles eurent la surprise de voir Naikin qui s’était joint à Benihime et Koshiro. Elles eurent aussi la non surprise de voir que Benihime avait sans aucun doute possible engloutie une bonne moitié des vestiges d’assiette sur la table, et qu’elle continuait à s’empiffrer joyeusement. Saeka s’installa à côté de Koshiro. Naikin se poussa pour laisser s’asseoir Haya, tandis que Benihime régnait en seule maîtresse sur le bord opposé.

C’était leur petit coin à eux. Haya ne les avait jamais vu ailleurs, que le restaurant soit vide, comme aujourd’hui, ou bien bondé. Elle ne pouvait en vouloir aux gens. Pendant longtemps, elle avait elle-même méprisé et craint la flamme jaune, jusqu’à ce qu’elle en vienne à la fréquenter régulièrement. Naikin disait que ce lien était important pour elle, et le serait encore plus quand tout kiri saurait qu’elle était la fille de Kade Kasen. Avant de faire une bêtise, disait-il, ils penseraient d’abord qu’elle était une kunoichi de kiri, puis qu’elle était sous la responsabilité de Satoshi Kagehisa, puis que si elle était la fille de Kade, elle fréquentait Hyô et qu’enfin, elle était traitée comme une égale par la flamme jaune. Cela représentait autant de couches de protection qui se montreraient utiles au moment opportun.

Haya commanda une quantité de nourriture qui lui sembla prodigieuse mais qui paraissait risible à côté de la propre commande de Benihime, trop occupée à penser à mâcher avant d’avaler pour entretenir la moindre conversation. Saeka commanda une part encore plus modeste de nourriture et Haya se dit, dépitée, qu’elle n’était même pas parvenue à lui ouvrir l’appétit après six heures d’entraînement. La honte…

Naikin - Alors, comment ça s’est passé ?

Haya -

Saeka - De jolis progrès.
Haya Sasaki

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MessageSujet: Re: Les Possédés   Les Possédés EmptyLun 9 Nov - 20:05

Les jours suivants se déroulèrent, à quelques variations près, d’une manière similaire.

Haya et Saeka travaillaient jusqu’à ce que tombe le crépuscule, puis elles repartaient en direction du village où elles dînaient tour à tour avec la flamme jaune, en tête à tête ou encore chez elles. Saeka parlait très librement d’elle, mais elle n’abordait toutefois jamais véritablement son passé, ce qui l’avait mené là où elle en était. Haya ne pouvait pas lui en vouloir, elle était exactement dans la même situation. Néanmoins, quelques indices subtils indiquaient que Saeka était une personnalité beaucoup plus enrichissante que le cadre strict de leurs séances d’entraînement.

Elle était juunin depuis un peu plus d’un mois, lorsque kiri avait décidé de s’armer en prévision de la guerre latente contre Asahi. Saeka n’avait pas souhaité s’occuper d’une équipe, pas parce qu’elle ne s’en sentait pas les capacités, mais parce qu’elle n’avait pas encore atteint son niveau d’excellente. C’était, aujourd’hui, ce qu’elle cherchait : un maximum qui, une fois atteint, lui permettrait de se disperser dans d’autres sphères sans pénaliser sa progression. Haya s’était trouvée quelque peu gênée à l’idée d’être précisément quelqu’un qui la ralentissait dans son chemin, mais Saeka avait devancé sa pensée pour lui dire que ces séances n’entraient pas dans cette catégorie et qu’au-delà de ça, cette perspective était davantage un idéal qu’une réalité.

Saeka - Je vais à présent t’attaquer avec ma propre chaîne, pour que tu en saisisses les mouvements. Oh, je n’essaierai pas strictement de te blesser.

Ce n’était malgré tout pas très engageant. Pendant qu’elles s’entraînaient, Haya était parvenue à plusieurs reprises à toucher Saeka (il faut préciser qu’après près d’une semaine passée à essayer de le faire, il aurait été absolument lamentable de ne pas y être arrivé une seule fois), mais la jeune femme avait des capacités d’évasion beaucoup plus importantes que les siennes propres. Haya s’apprêtait à argumenter l’air de ne pas y toucher que les mouvements de la chaîne ne lui étaient plus inconnus à présent, mais Sakae ajouta :

Saeka - A ce sujet, tu peux utiliser ton chakra pour augmenter ta vigilance. Avec l’expérience, là aussi, on n’a plus besoin de chakra mais cela dépend de l’adversaire que tu as en face de toi. C’est un peu le même principe qu’ajouter du chakra à tes coups, peu à peu tu en auras moins besoin.

Elle sourit.

Saeka - J’ai d’ailleurs dû l’utiliser à plusieurs reprises pendant nos petites sessions.

Haya se passa une manche sur le front (qui était ces jours ci perpétuellement couvert de sueur et l’impression de sentir l’animal mort quand elle rentrait le soir avait de plus en plus de mal à quitter son esprit). Elle ne se souvenait pas avoir vu Saeka utiliser une seule technique, bien qu’elle se souvienne avoir ressenti du chakra dans l’air. Mais elle l’attribuait alors aux membres de la flamme jaune, qui s’entraînaient tout près. Savoir que Saeka avait tout de même dû utiliser à plusieurs reprises (une façon polie de dire deux fois, Haya n’en doutait pas) une technique pour améliorer son étonnant potentiel d’esquive n’était pas sans la flatter.

Haya - Ah? Comment?

Saeka s’approcha d’elle et Haya discerna peu à peu une certaine densité de chakra autour d’elle, effectivement. Elle passa sans difficulté la main à l’intérieur et la retira, légèrement surprise. Le dôme n’était pas très grand, il englobait un certain périmètre autour de Saeka mais probablement trop peu pour inclure quelqu’un dedans. Peut-être, toutefois, que Saeka était capable de l’étendre davantage, rien n’indiquait le contraire.

Haya - Et ça te permet de mieux éviter ça ?

Saeka - Pas exactement, non. Cela m’indique qu’une attaque arrive, ainsi que son angle, ce qui me permet de l’éviter. Mais plus tu utiliseras cette sphère, plus tes sens s’aiguiseront et ta capacité d’évitement s’améliorera naturellement.

Haya acquiesça plusieurs fois la tête.

Haya - Ce n’est pas une barrière de protection donc?

Saeka - Non.

Haya - Mais si j’utilise cela toute la journée, je serais fatiguée trop vite, non ?

Saeka - C’est vrai, même si la sphère n’est pas trop exigeante. Tu vas alterner, tu l’utilises deux minutes, puis tu ne l’utilises plus, d’accord ?

L’utiliser, l’utiliser, encore fallait-il la produire ! Haya s’y essaya modestement, mais extérioriser son chakra de cette façon était encore inédit pour elle. Elle ne voyait pas comment l’expulser par tous les pores de sa peau. Visiblement Saeka n’avait pas fait de gestes particuliers pour manifester la sphère autour d’elle, mais le chakra devait bien venir de quelque part.

Saeka - C’est une technique très basique dans son fonctionnement, ne te complique pas la tâche. Il suffit de… oh, c’est comme pour les techniques suiton, l’eau en moins. A la place de créer un mouvement pour diriger l’eau, tu crées un mouvement pour ériger une barrière.

Haya s’y repris plusieurs fois, sous le regard azuré et serein de Saeka. Ce n’était pas très probant, un bon quart d’heure plus tard elle n’était toujours pas arrivée à créer la moindre ombre de barrière.

Saeka - On va reprendre l’entraînement, tu verras que quand tu en auras besoin, tu parviendras à créer la sphère autour de toi.

Les prévisions de Saeka se révélèrent moins justes que prévu. Après une heure similaire aux autres, Haya n’était toujours pas parvenue à maîtriser correctement la technique. Elle était superficiellement blessée à la cuisse et aux côtes et il lui semblait à présent certain qu’elle ne pourrait plus tenir le rythme bien longtemps. Haya n’avait pas une constitution très fragile, mais elle n’était pas pour autant faite pour les combats qui s’étiraient en longueur. Surtout quand elle ne maîtrisait pas elle-même la longueur du combat et qu’elle ne pouvait faire autrement que jouer sur la composition d’un autre.

Elle parvint néanmoins à produire quelque chose de consistant avant la fin de l’entraînement. Haya ne s’en rendit pas compte immédiatement, elle s’en aperçut quand son esprit, d’une façon subtile, lui indiqua l’angle de l’attaque et dévoila également le très léger effet qu’avait donné Saeka à sa chaîne. Elle se déplaça ainsi de sorte à éviter réellement l’attaque et non simplement la trajectoire visible et resta quelque peu stupéfaite. Trop peu de temps toutefois pour se faire avoir par une nouvelle attaque, car Saeka avait cette fâcheuse habitude à contrôler sa chaîne aussi bien que si elle n’était qu’un prolongement de son bras (et quel bras !).

Au fil des minutes, l’emprise d’Haya sur sa barrière s’intensifia. Il ne s’agissait effectivement que d’une manifestation très classique du chakra, qu’elle sentait comme à son habitude couler et chauffer doucement à l’intérieur de son corps. Mais elle n’avait jamais réellement étudié sa structure de façon formelle et jusqu’à présent, elle était plus intimement liée avec l’utilisation de l’eau conjointement au chakra qu’avec le chakra seul.

Saeka remarqua la différence de qualité dans son esquive et effectua des attaques plus précises, plus vicieuses. Haya maintint la sphère un peu plus des deux minutes prévues puis l’arrêta, et les heures déroulèrent ainsi avec une même régularité. La fatigue et la sensation d’avoir de moins en moins de chakra dans le corps forcèrent Haya à lever une main pour demander une pause. Saeka ramena sa chaîne à elle et la rejoignit d’un pas tranquille. Elles marchèrent sur quelques mètres puis décidèrent que l’entraînement s’arrêterait là pour aujourd’hui. En effet, le soleil n’allait pas tarder à se coucher et la séance avait été plus exigeante que la semaine passée. Haya s’écroula par terre et étendit les jambes au maximum. Elle se souvenait des premiers mois qu’elle avait passé à l’académie, quand elle pouvait marcher de façon plus ou moins harmonieuse et que les séances de physique pur étaient de longues tortures pour elle. Ce n’était pas tant l’effort actuel qui l’épuisait, mais les conséquences le lendemain sur ses muscles de jeune adolescente. Son corps n’avait jamais été habitué à de tels efforts, même si Haya n’avait jamais été inactive il n’avait pas la musculature suffisante pour être ninja. Alors elle passait des jours entiers à avoir de vagues douleurs dans les jambes et dans les bras, jusqu’à ce que son corps s’habitue à ces nouvelles exigences et les adoptent.

Elle s’adossa à l’arbre et ferma les yeux un instant, retrouvant une respiration apaisée. Saeka ne bougeait pas, les genoux ramenés sous son menton et le regard dans le vague. Les membres de la flamme jaune avaient également cessé l’entraînement et des éclats de voix leur parvenaient indistinctement, plus loin. Benihime… Ryosen… et certainement Naikin.

Haya - Qu’est-ce qui t’a amené à fréquenter la flamme jaune?

Saeka - Oh, c’est Ko. Je ne fréquentais pas beaucoup les autres équipes au-delà de la mienne et pendant les cours, je restais avec mes amis. Et puis, cette flamme jaune était toute récente à ce moment et elle a très vite eu une mauvaise réputation.

Haya - Je n’en ai entendu parler que plusieurs mois après être devenue genin.

Saeka - Je connaissais l’histoire de la flamme moi, mais les membres actuels ne m’intéressaient pas beaucoup. Je les trouvais prétentieux et pas vraiment dignes de cette position, mais encore une fois, je ne les connaissais pas.

Elle sourit.

Saeka - La vérité c’est que Naikin est certainement l’un des juunin les plus talentueux et qu’il a réussi à composer une équipe plutôt exceptionnelle. J’ai eu la chance de faire une mission avec eux, dernièrement, ils ont un travail d’équipe extraordinaire. Quand on regarde Benihime et Ryosen, on pourrait se dire qu’ils ont des styles opposés, mais ils parviennent à en faire quelque chose de vraiment bien. Cela leur a pris longtemps pour parvenir à ce résultat.

Haya - Ils se connaissaient avant ?

Saeka eut une moue d’hésitation.

Saeka - Je ne voudrais pas dire de bêtises, mais je crois que Benihime connaît Ryosen depuis qu’ils sont très jeunes. Ko et Naikin se connaissaient quand ils étaient genin, ils étaient dans des équipes opposées. En fait, les chefs ne se supportaient pas, mais Naikin et Ko s’entendaient bien. Ensuite… Naikin a demandé au mizukage de pouvoir disposer de la flamme jaune. On lui a répondu qu’il était talentueux, mais trop jeune et qu’un chuunin ne pouvait pas accéder à ce rang. Quand il est passé juunin, il a posé la même question et on a accepté. Il a recruté Ko, puis il a cherché quelle pouvait être l’autre personne la plus talentueuse de cette génération. Il est tombé sur Ryosen, dans un premier temps, qui a refusé de venir sans Benihime. Naikin a alors eu une équipe de quatre.

Haya - Naikin a cédé au caprice de Ryosen?

La jeune femme sourit et arrangea l’une de ses mèches bleues derrière son oreille.

Saeka - Il a observé Benihime, d’abord, et il en est arrivé à la conclusion qu’elle était également l’une des plus talentueuses de sa génération. C’était il y a deux ans, Naikin et Ko avaient dix-huit ans.

Haya - Et comment tu es entrée en contact alors ?

Saeka - Ko était réputé pour avoir une excellente esquive. Je souhaitais m’entraîner à la chaîne, et mon professeur m’a indiqué que ce pouvait être une bonne solution. Puis, bien, je suis tombée amoureuse et lui… disons que ça lui a pris un peu plus longtemps mais qu’au final on a trouvé un terrain d’entente.

Haya acquiesça en souriant. Elle imaginait sans mal Koshiro mettre un peu plus longtemps pour tomber amoureux.

Saeka - C’était il y a six mois maintenant.

C’était étrange, mais elle n’avait jamais réellement parlé de la formation de cette flamme jaune ci, avec les membres qu’elle fréquentait pourtant tous les jours. Cela ne l’étonnait pas plus que cela, cette création. On sentait à les voir que Ryosen et Benihime partageaient une vieille complicité et qu’ils nouaient des relations peut-être un peu trop complexes pour être parfaitement saines, mais cela les regardait. Haya les observa approcher, Benihime qui s’étirait longuement, Ryosen qui suivait plus loin derrière et Naikin, qui était effectivement là, les mains dans les poches. Il discutait avec Benihime d’une ancienne mission dont la jeune fille ne se souvenait pas bien, d’après ce qu’Haya pouvait comprendre de là où elle était.

Haya - Je les aime bien.

Elle sentit Saeka sourire.

Saeka - Et ils t’aiment beaucoup aussi, murmura-t-elle.

Benihime - Alors on a fini de se rouler les pouces les filles ?

Elle sourit de toutes ses dents (et c’était un peu inquiétant à voir, en fait).

Benihime - Prêtes pour le vrai combat de la journée ?

Haya jeta un coup d’œil furtif à Saeka qui souriait avec son habituelle sérénité.

Haya - Heu, ça depend lequel, dit-elle sans trop se mouiller.

Benihime posa une main sur son cœur, ferma les yeux et soupira avec une intense satisfaction.

Benihime - Eh… Manger.


Dernière édition par Haya Sasaki le Sam 27 Fév - 19:57, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Les Possédés   Les Possédés EmptyVen 26 Fév - 18:19

Haya se réveilla avec un point de fatigue dans les membres. Elle s’étira longuement, les mains derrière la tête, puis glissa les jambes hors de son lit et se frotta énergiquement les yeux. Le soleil était levé depuis un moment, mais la jeune fille ne parvenait pas à estimer l’heure qu’il était. Elle n’avait rendez-vous qu’en début d’après-midi pour poursuivre son entraînement, et d’ici là il devait lui rester au moins deux bonnes heures. Haya prit une douche rapide puis se fit couler un bain. Elle s’emmitoufla dans son peignoir, partit se préparer à manger dans la pièce voisine, puis revint s’immerger dans sa baignoire. Haya poussa un long soupir et décontracta les muscles de son corps, les mains sur le ventre, indifférente aux volutes de fumée et à la chaleur de l’eau.

Elle devait voir Kinsuke ce soir. Ils sortiraient sans doute manger dehors. Haya se promit d’essayer de se faire jolie, cela faisait deux semaines qu’elle emportait systématiquement dans son appartement cette rance odeur de bête fauve qui revient juste de la chasse. C’était peut-être grisant pour certains, mais Haya avait seulement l’impression d’avoir dormi au fond d’une poubelle. Ce n’était pas exactement l’état d’esprit qui convenait à une nuit lascive et tendre. Mais ce soir, elle rentrerait un peu plus tôt, prendrait un peu soin d’elle, mettrait une jolie robe et rejoindrait finalement Kinsuke chez lui.

Deux semaines… ses compétences avec sa chaîne étaient tout de même nettement moins risibles que par le passé. Elle parvenait même à faire, avec un peu de chance, quelques effets à la fois jolis et efficaces. Son arme remplissait enfin son office d’arme de soutien, même si quelques fois auparavant Haya était parvenue à l’utiliser sans avoir à rougir (comme avec les pirates, sa chaîne en a emporté quelques uns dans un monde sans doute moins maritime), il n’y avait pas réellement de maîtrise. S’il était hélas avéré qu’Haya ne deviendrait jamais une experte dans le maniement de sa chaîne, elle savait désormais qu’elle pourrait reproduire sereinement des coups suffisamment intéressants pour l’aider. Mieux encore, Haya s’était ouverte à d’autres formes d’utilisation de son chakra et s’il lui avait fallu un temps d’adaptation pas encore tout à fait terminé, elle s’était là aussi améliorée.

Son rythme lui convenait. Elle n’était pas pressée, pas particulièrement. Il lui faudrait agir avec patience quoi qu’il arrive, alors il ne lui restait qu’à commencer dès à présent à la supporter. Elle ne pouvait de toute façon pas faire autrement, au risque de brusquer les événements et d’échouer. Ce n’était pas quelque chose de concevable.

Haya arriva un peu en avance, mais Saeka était déjà là également, occupée à discuter avec Koshiro. La jeune fille fut un peu gênée à l’idée d’aller les interrompre, l’impression d’être le cheveu sur la soupe ne lui plaisait pas du tout, d’autant plus qu’elle accaparait par ailleurs tout le temps de Sakae. Heureusement, Ryosen l’appela d’un geste de la main. Il était près des berges, visiblement seul.

Haya le rejoignit sans se faire (trop) remarquer des deux amoureux.

Ryosen - Enfin quelqu’un d’autre… Non, tenir la chandelle brûle les doigts.

Haya - Oh, ils n’ont pas beaucoup de temps à eux.

Ryosen - On va pas les plaindre non plus, hein.

Haya sourit.

Ryosen - Tu sais, il va falloir que je prenne ma revanche. Benihime me chambre depuis que tu m’as battu.

Haya - Je ne t’ai pas vraiment battu.

Ryosen haussa les épaules et eut un geste de la main distrait.

Ryosen - Techniquement, non, mais dans les faits, si. Cela manquait encore un peu de fluidité mais c’était tout de même impressionnant.

Ryosen observa les yeux écarquillés d’Haya puis reprit.

Ryosen - Pour quelqu’un d’inférieur à moi, je veux dire.

Haya - Tu fais des… compliments ? Ouah.

Ryosen - Tais-toi, ancienne muette. Je préférai quand j’étais seul en fait.

Haya - Ce qu’il est bougon...

Ils allèrent s’asseoir par terre, à quelques mètres de l’eau. Haya posa sa tête sur ses genoux et contempla sans rien dire les légers remous du lac, tandis que Ryosen admirait ses ongles. Personne ne s’entraînait alentour, et les lieux semblaient étonnamment calme, avec une beauté qu’Haya n’était pas certaine d’avoir remarqué jusqu’alors. Plus les jours passaient, plus elle s’ancrait à l’intérieur, plus elle appréciait kiri. Bien sûr, un jour, ils seraient peut-être amenés à faire la guerre. A voir des atrocités et à en commettre d’un ton égal. Peut-être aussi qu’un jour elle en viendrait à détester ce village et ce qu’il représentait. Mais Haya n’avait pas intégré les rangs des ninjas de kiri sans le savoir ou, plutôt, elle n’avait pas décidé de progresser sans le savoir. Pour l’instant, elle aimait kiri et pas seulement ce qu’il lui avait apporté.

Ryosen - Tu réfléchis.

Haya - Je me disais que j’aimais kiri.

Ryosen - Ah. Nous n’avons encore rien appris sur Encho Daisuke.

Haya acquiesça. Il le lui aurait déjà annoncé autrement.

Ryosen - Dis-moi...

La jeune fille redressa la tête et rendit son regard à Ryosen.

Ryosen - Est-ce que c’est pour tes sœurs, pour ton père, ou bien pour toi que tu as choisi ce chemin ?

Il y avait dans sa voix un sérieux inhabituel. Haya détourna la tête, songeuse. Elle se passa la langue sur les lèvres et murmura, tout bas :

Haya - Un peu des trois.

Elle sourit tristement.

Haya - Je ne recherche pas la justice, parce qu’il n’y en a pas forcément. Ce n’est pas une vengeance. Je ne veux pas tuer ces hommes parce qu’ils m’ont fait du mal, qu’ils ont précipité ma vie quelque part où je ne le voulais pas ou parce qu’ils ont tué mes sœurs juste sous mes yeux. La vengeance… mes sœurs sont en paix. J’en suis convaincue. Mais l’équilibre… c’est pour l’équilibre que je me bats. Mes sœurs sont mortes, il est juste qu’ils meurent aussi. Ils m’ont… façonnés. Ils ont fait de moi ce que je suis. C’est une question de responsabilités. Si ce jour ne venait pas… quelque chose ne serait pas terminé, quelque part, et ce serait intolérable. Mon père… est mort en sachant que nous allions être massacrées. Elle secoua la tête et retourna à sa contemplation du lac. Qu’est-ce qu’il peut y avoir de plus horrible ? J’ai vu ma sœur se faire violée et décapitée à moins d’un mètre de moi et pourtant, je ne supporte pas d’imaginer ce qu’il a pu ressentir. La haine qu’il éprouvait pour lui-même… Plus encore que pour ses ennemis. Mon père était possédé par sa mission. Je ne le suis pas. Je ne saurais jamais pourquoi il est allé jusqu’au bout de cette mission impossible. Mais je la terminerais pour lui, parce que je crois que c’est la bonne chose à faire. Alors, j’aimerais qu’il se déteste un peu moins parce que je ne lui en ai jamais voulu. Jamais…

Ryosen ne dit rien. Haya avait parlé lentement, de cette voix de basse qui n’était peut-être pas tout à fait la sienne, mais qui l’était devenue. Ils restèrent silencieux pendant plusieurs minutes, chacun à ses pensées. Dans toute cette histoire, son histoire, Haya avait cessé de chercher des responsables. Il y en avait, forcément, mais ils l’étaient tous. Absolument tous. Il n’y avait pas une source unique qui déverserait du mal pour le plaisir, mais plusieurs petites anicroches qui, mises bout à bout, se sont incarnées sous cette forme. Il n’y avait aucune satisfaction à pointer un coupable et Haya ne s’engageait pas là dedans pour trouver de la satisfaction. Elle allait tuer Nagata Hideyoshi, ou mourir en essayant, mais il n’y aurait pas d’alternatives.

Ryosen - Nous y arriverons, Haya. Tu pourras compter sur nous jusqu'à la fin. Cela… ne fait pas l’ombre d’un doute.

Il se releva et lui tendit la main pour l’aider. Haya s’exécuta, non pas parce qu’elle en avait besoin, mais elle était tellement surprise de l’attention qu’elle ne réfléchit pas. Il hocha la tête et s’apprêta à se détourner quand Haya l’arrêta, une nouvelle fois.

Haya - Et pourquoi as-tu choisi ce chemin ?

Ryosen ne fit pas le moindre mouvement, mais son dos se redressa progressivement. Il tourna légèrement la tête.

Ryosen - « Un travail acharné vient à bout de tout ». Je suis moi aussi possédé, Haya, mais par d’autres démons que ceux de ton père.

Il repartit sans rien ajouter, laissant Haya à ses interrogations. De quel travail et de quels démons parlait-il ? Elle aurait sans aucun doute pu le poursuivre et le harceler, mais elle se disait avec philosophie qu’elle finirait tôt ou tard pour pénétrer ces secrets. Avec, encore une fois, de la patience. Elle retourna sur ses pas et avisa, plus loin, Saeka debout et Koshiro qui s’apprêtait à rejoindre Ryosen comme si tout le monde avait répondu à une sonnerie muette qui leur aurait ordonné de reprendre leurs activités. Saeka adressa un signe de main à Haya, tandis qu’elle s’approchait.

Saeka - Alors Haya, prête pour une nouvelle séance ?

Et prête, elle l’était…

Trois heures plus tard, Haya pu raisonnablement estimer qu’elle maîtriser correctement cette histoire de dôme de chakra. Elle l’avait alterné pendant plus d’une heure, deux minutes avec, deux minutes sans et tout au long de la semaine, il était vrai que ses réflexes s’étaient quelque peu affinés. Sakae avait beau ne pas utiliser tout son talent avec ses armes, les progrès lui semblaient évidents.

Sakae s’approcha d’elle, son arme enroulée autour de son poignet.

Saeka - C’est bien ! On va légèrement adapter notre programme d’entraînement.

Haya s’attendait au pire. Par expérience.

Saeka - Je vais essayer de t’engager au corps à corps à présent, toujours avec la chaîne. Tu devras réussir à me contenir et, si possible, me repousser.

Haya - Avec ou sans chakra ?

Saeka - Avec. C’est un peu comme pour la sphère, tu extériorises ton chakra brusquement et cela est censé m’éloigner.

Elles reprirent l’entraînement peu après, et le jeu de Saeka était nettement plus pressant. Après avoir assisté à son aisance à distance ou à mi-distance, Haya l’aurait pensé spécialisée dans ce type de combat. En réalité, Saeka semblait beaucoup plus à l’aise à proximité, ses attaques étaient plus précises et elle se fendait de quelques coups particulièrement impressionnants. Haya appréciait modérément la façon qu’elle avait de faire tourner sa chaîne très rapidement sur les côtés et face à elle pour contraindre et limiter ses déplacements. Elle n’avait pas du tout l’agilité nécessaire pour éviter de se faire prendre au piège, il aurait certainement fallu… sauter ou bien… se pencher rapidement, mais trop pour que cela soit de son ressort.

Toutefois, elle ne quittait pas l’objectif de son exercice de la pensée. Haya réalisa une nouvelle fois le dôme, qui augmenta sensiblement sa vitesse de réaction. A plusieurs reprises lorsqu’elle sentait que l’occasion s’y prêtait, elle essaya de faire jaillir son chakra de façon plus violente, mais il n’en résultait pas grand-chose de remarquable, hormis une légère fluctuation du dôme. Néanmoins, Haya parvint à quelque chose de probant en moins de temps qu’il ne lui avait fallu pour commencer à appréhender l’utilisation précédente de son chakra.

En effet, lors de l’une de ses tentatives, son chakra parcourut douloureusement l’ensemble de son corps et repoussa Sakae d’un pas. La jeune femme reprit aussitôt ses assauts, avec une ardeur renouvelée, comme si de rien n’était. Haya ne parvint plus à renouveler correctement l’exploit lors des trois heures suivantes. Elle finit par rompre le combat à l’ancienne, en reculant et fit un signe à Sakae pour qu’elle ne l’engage pas à nouveau. Le soleil commençait lentement à se coucher et elle avait promis de ne pas être en retard.

Saeka - C’est pas mal. Tu arriveras bientôt à faire mieux, mais il faut dire à ta décharge que j’ai un bon maintien.

La jeune femme sourit.

Saeka - On se revoit demain alors. On va amorcer notre dernière séquence, dans le temps estimé. Avec toutes ses techniques cumulées, tu devrais pouvoir développer une bonne synergie.

Haya - Oui, merci beaucoup.

Saeka - Je t’en prie. Passe une bonne soirée Haya, et profites-en bien !

Haya - Merci, à toi aussi.

Haya regarda Saeka retourner auprès de Ryosen et Koshiro, dont on entendait les chocs sourds plus loin. De là où elle était, la jeune fille ne voyait rien d’autre que de rares couleurs entre deux troncs fins. Elle s’épongea le front et rentra au village d’un pas égal.

*****

Kinsuke ouvrit la porte presque aussitôt et Haya l’enlaça, les yeux mi-clos contre son épaule. Depuis qu’elle parlait, ils avaient eu quelques conversations mais curieusement, rien n’avait fondamentalement changé. Les petits silences tendres demeuraient, sans qu’aucun des deux ne se sente obligé de dire quelque chose. Quelque part, Haya suspectait Kinsuke de l’avoir saisie plus profondément qu’il ne voudrait bien l’avouer lui-même mais à mesure qu’elle s’habituait à ce qui serait désormais sa nouvelle nouvelle vie, Haya se rendait compte qu’effectivement, rien n’avait changé. Ses amis l’enveloppaient toujours aussi délicatement, et Haya n’était même pas sûre de pouvoir dire que leurs rapports avaient gagné en vitesse et en intuition.

La jeune fille en était heureuse. Elle ne souhaitait pas revivre son arrivée à kiri. Seule, handicapée, détruite en surface et atteinte jusqu’au plus profond d’elle-même, avec cette sensation glaçante que plus rien ne serait jamais comme avant.

Kinsuke - Content de te voir. Je suis bientôt prêt.

Haya - D’accord.

Il la conduit dans son salon et Haya s’installa sur le canapé, les genoux joints. Elle avait remis une longue robe noire dans laquelle elle entrait toujours, ce qui n’était pas sans l’étonner. Cela devait faire… peut-être trois ans que son père la lui avait achetée pour s’excuser de l’une de ses nombreuses absences. Ce n’était certainement pas ce qui se faisait de plus sensuel, mais Haya était toujours attachée à cette robe toute simple qui lui arrivait aux genoux, d’un noir uniforme qui lui collait au corps (un peu plus que dans son souvenir) et très légèrement ouverte sur la cuisse. Elle ne l’avait pas mise une seule fois à kiri, les occasions de célébration étant relativement rares et toujours dans un contexte un peu militaire.

Le salon de Kinsuke était plus petit que le sien, mais plus chargé. C’était le salon de quelqu’un qui avait construit sa vie à kiri depuis sa naissance, avec des photos de sa famille, de ses amis, de sa première équipe, quand il avait douze ans (et les cheveux longs, mais heureusement un jour il avait dû découvrir que toutes ces lames pouvaient lui rendre d’autres services que découper ses ennemis), de sa seconde équipe, des chuunins d’après leur âge, et son équipe actuelle de jeunes genins. Haya se leva et se dirigea vers le mur de photos. Elle passa son doigt sur le visage d’une jeune femme souriante et fatiguée, belle d’une certaine façon, mais inexplicablement triste.

Kinsuke - C’est ma sœur aînée.

Haya se retourna comme si elle avait été prise sur le fait. Elle avait la curieuse sensation, sans savoir exactement pourquoi, d’avoir aperçu quelque chose qu’elle n’était pas supposée voir. Mais Kinsuke lui sourit simplement.

Haya - Je ne savais pas que tu avais une sœur aînée.

C’est la seule photo d’elle, manqua-t-elle ajouter, mais elle se mordit la langue. Kinsuke hocha la tête.

Kinsuke - Je ne l’ai pas vraiment connue. Elle ne vivait pas ici.

Il sourit à nouveau et détourna la tête.

Kinsuke - Elle n’aimait pas beaucoup ce qu’on faisait ici. Et je pense qu’elle avait raison.

Haya - Est-ce que...

Kinsuke - Elle a été tuée par des personnes qui en voulaient à mes parents. J’avais quatorze ans et je venais de passer chuunin. On a reçu une lettre, et une photographie avec le… corps de ma sœur, méconnaissable. Mes parents m’ont interdit de venir, mais ils sont revenus une semaine plus tard sans rien de plus que la satisfaction d’avoir brûlé la maison où Masayo est morte. Même pas un corps sur lequel se recueillir, il ne restait rien que des traces de sang. Ils ont massacré toute sa famille, son mari, ses enfants. Je n’ai plus qu’une… putain de photo d’elle, mes parents ont brûlé celle qu’on leur avait envoyé. Nous n’avons jamais retrouvé les coupables. J’ai cherché, cherché, cherché. Mon père est mort pendant une mission, ma mère a déclaré qu’elle arrêtait là. Elle est allée vivre à Nagumo, sous une autre identité. Je n’ai pas le droit de lui envoyer des lettres pour pas qu’on la repère. Je vais la voir une fois de temps en temps, en me demandant si on me préviendrait si elle était morte. Mais elle est toujours là et toujours si… abattue. On m’a dit que pour passer juunin, il fallait que je me concentre sur le présent et que j’accepte les échecs passés. Les échecs… Comme si cela dépendait de moi ! Mais je ne suis pas intéressé par les grades supérieurs. Je veux juste retrouver les coupables.

Kinsuke releva la tête fièrement et croisa le regard d’Haya, qui restait interdite à moins de deux mètres de lui.

Kinsuke - Je n’ai pas ta force, Haya. Je cherche ces salopards pour les éventrer, pour épancher cette vengeance. Je crève de soif, Haya, j’ai la gorge sèche. Je ne connaissais même pas bien ma sœur mais ce qu’ils ont fait… c’est si… méprisable, lâche… Je ne peux pas juste me dire que ce sont des choses qui arrivent.

Haya - Bien sûr que tu ne peux pas…

Haya se rapprocha de lui pour le serrer contre elle. Un instant, elle crut que Kinsuke allait se dégager mais il se laissa faire et lui rendit son étreinte.

Haya - Ce ne sont pas des choses qu’on peut laisser faire.

Ils restèrent ainsi quelques secondes, puis Kinsuke s’écarta et ils s’assirent en silence sur le canapé, sans se lâcher les mains et sans savoir non plus quoi dire. Haya ne pouvait pas réellement parler de mystère Kinsuke parce qu’elle avait toujours eu la sensation d’en savoir beaucoup sur lui, sur différents aspects de sa vie. Mais comme souvent, elle se rendait compte que les gens qui l’entouraient n’étaient pas faits d’une seule couche, qu’ils avaient plusieurs épaisseurs, plusieurs rôles, certains plus douloureux et intimes que d’autres, certains qu’ils ne souhaitaient pas partager parce qu’ils faisaient trop mal.

Kinsuke - Je ne suis pas avec toi par pitié.

Haya - Hein ?

Kinsuke - Je vais être un peu maladroit, j’espère que je ne serais pas grossier. J’ai perdu une sœur dans des circonstances qui m’ont énormément marquées et… tu as vu disparaître ta famille. Je ne suis pas avec toi par pitié, ni pour essayer de me donner bonne conscience maintenant.

Il posa deux doigts sur le front d’Haya.

Kinsuke - Je suis avec toi pour ça.

Sa main descendit lentement jusqu’à sa poitrine.

Kinsuke - Et pour ça.

Haya acquiesça lentement, incertaine sur ce qu’elle devait comprendre réellement. Elle sourit.

Haya - Pour ça, ou pour ce qu’il y a à l’intérieur ?

Kinsuke - Bien, c’est toujours mieux quand c’est joliment emballé.

Haya sourit plus largement et déposa un baiser sur le coin de sa bouche.

Haya - Là, tu es maladroit.
Haya Sasaki

Haya Sasaki


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MessageSujet: Re: Les Possédés   Les Possédés EmptyDim 28 Fév - 17:47

Saeka - Salut Haya ! Alors, cette soirée ?

La jeune fille lui adressa un large signe de la main alors qu’elle approchait. Haya lui sourit et haussa les épaules légèrement.

Haya - Heu… Un peu traumatisante.

Saeka - Oh je suis désolée…

Haya - Non, non ! Ca s’est bien passé. Enfin, ça ne s’est pas mal passé. Mais on a un peu plombé l’ambiance.

Saeka sourit d’un air sincèrement navré.

Saeka - Des ninjas qui s’amusent, c’est toujours rare.

C’était malheureusement ce qui lui semblait. Néanmoins, même si la soirée avait été mal engagée, ils avaient fait en sorte de repartir d’un meilleur pied et après quelques longs câlins sur le canapé, ils s’étaient décidés à sortir comme prévu et ils n’avaient pas abordé le moindre sujet qui aurait pu renvoyer à la moindre goutte de sang. Il y en avait beaucoup plus qu’on pouvait le croire de prime abord, puisqu’ils étaient rentrés raisonnablement tard et avaient repris ce qu’ils avaient commencé plus tôt.

Les similitudes entre ce qui était arrivé à la sœur de Kinsuke et sa propre histoire ne l’avaient même pas effleuré, sur le moment, mais même après quand elle y avait repensé, Haya trouvait cela tristement normal. Rien dans ce qui lui était arrivé ne lui avait jamais semblé sortir de son nouvel ordinaire. Il y avait des enfants cassés un peu partout dans le village et Haya était sûre que c’était pareil dans les autres. Des familles massacrées, des vengeances barbares qui appellent de nouvelles vengeances, peut-être encore plus violentes et sauvages, et chacun s’agençait autour de ça.

Saeka - Kinsuke est quelqu’un de bien.

Haya cligna des yeux et releva la tête vers Saeka.

Haya - Je ne savais pas que tu le connaissais.

Saeka - Nous avons travaillé ensemble à deux reprises, pendant deux missions différentes, quand j’étais chuunin. Très attentif. C’était notre chef et il avait des évaluations meilleures que les miennes, pourtant il est resté chuunin.

Haya - Ah. J’imagine que je ne dois pas compter sur lui pour me pistonner alors.

Saeka sourit.

Saeka - Tu as un humour perturbant. Et tu seras une excellente ninja.

Haya ne voyait pas comment les choses pouvaient être liées, mais Saeka était déjà partie sur autre chose et revenait sur les dernières semaines. Des progrès importants, tant dans le maniement de la chaîne que dans celui du chakra. Haya avait pu observer la formidable malléabilité du chakra, c’était mieux que… le seul exemple qui lui venait en tête était de la pâte à modeler, et quelque part c’était une encourageant que le chakra soit meilleur. Mais jusqu’à présent elle ne l’avait utilisé qu’avec des techniques d’eau, pour en créer ou en projeter, comme un canard joyeux mais dépourvu de pouces. Saeka lui avait en quelque sorte donné des pouces, ce qui lui permettait d’englober davantage d’utilisations du chakra, dans sa forme la plus pure et la plus essentielle, peut-être. Haya résista vaillamment aux appels de son cerveau pour imaginer un canard avec des pouces qui battait des ailes sur l’eau (peine perdue) et se concentra sur ce que disait Saeka.

Saeka - … aborder l’avant-dernière phase de notre programme d’entraînement. Tu te déplaces trop lentement et ton éventail de réaction est trop limité. Si je voulais te faire mal au contact, tu ne pourrais pas répondre de beaucoup de manière différente pour t’éloigner ou m’éloigner, tu serais obligée soit d’attaquer plus fort que moi, soit de te désengager manuellement, je dirais, ce qui peut te pousser à faire des erreurs et t’interdit de choisir ton terrain.

Un canard avec des pouces et des pieds pour courir plus vite.

Malin.

Saeka - Mais tu verras qu’il est possible d’utiliser son chakra pour accélérer un peu les choses, à travers la téléportation notamment.

Haya sentit un frisson d’excitation courir le long de sa colonne vertébrale. Cette technique l’avait toujours attirée depuis qu’elle était enfant. Elle se souvenait très précisément du jour où elle avait décidé que cette technique rendait définitivement les ninjas très cool. Une équipe de kiri était brièvement passée par son village. Haya était avec sa sœur aînée, Kaoru, et elles avaient observé ces ninjas qui venaient acheter des vivres. Au moment de partir, ils ont remercié le commerçant puis se sont téléportés dans un nuage épais de fumée, tous en même temps, sans s’être consulté. Il n’y avait pas à dire, ça faisait son petit effet.

Saeka - Ce n’est pas beaucoup plus compliqué que le reste, mais cela demande une certaine discipline. Néanmoins, cette technique t’offre énormément de possibilités : grâce à elle, tu pourras parcourir des distances énormes instantanément, que ce soit pour rejoindre ou fuir un point rapidement, mais aussi t’en servir de protection contre les attaques de tes adversaires ou, au contraire, l’utiliser pour te rapprocher d’eux sans qu’ils s’y attendent.

Haya - Et comment on contourne le problème de la masse ?

Saeka sourit à nouveau.

Saeka - Tu crées des torrents d’eau et tu te poses encore ce genre de questions ?

Haya - Ce n’est pas pareil, surtout avec le suiton : je crée toujours à partir de quelque chose. Je ne crée par la masse, je me contentes de la mettre en mouvement.

Saeka acquiesça, ne la laissant pas poursuivre son raisonnement.

Saeka - Précisément : tu la mets en mouvement. La téléportation fonctionne sur le même principe, excepté que le mouvement est beaucoup plus rapide. Et que la masse, c’est toi. Sans vouloir t’insulter.

Haya eut un petit mouvement dubitatif de la tête, mais la jeune femme ne la laissa pas se perdre dans le doute. Elle la prit par le bras et la conduisit un peu plus loin.

Saeka - De l’exercice, et cela sera plus clair.

Il était presque neuf heures du soir lorsque Saeka dit à Haya qu’elles s’arrêtaient là pour l’instant. Les progrès avaient été risibles, pas la moindre disparition à signaler juste à un moment un épais nuage de fumée, mais c’était Benihime qui avait lancé un fumigène pour rigoler. Haya s’ébouriffa ses cheveux trempés de sueur des deux mains, s’agenouilla auprès du lac et plongea la tête dedans.

Le temps lui avait toujours semblé ralentir lorsqu’elle était sous l’eau. C’était un sentiment curieux, elle n’entendait plus grand-chose du monde extérieur, et pourtant certains sons lui venaient avec une netteté stupéfiante. Elle percevait ainsi Saeka (du moins, c’était le ton de Saeka) qui parlait, et Koshiro lui répondre. Ce n’était qu’un barbouillis de paroles, bien qu’Haya s’imaginât saisir un mot plutôt qu’un autre de temps en temps. Elle émergea et frissonna lorsque des trombes d’eaux descendaient le long de son dos ou de son ventre.

Elle retira sa veste et se sécha les cheveux d’une main lasse.

Saeka - Tu verras, ça ira mieux en pratiquant. La téléportation est une technique qui fonctionne sur un mécanisme simple et tu as l’habitude de complexifier un peu les choses.

Haya - Oui, ça viendra.

En rentrant chez elle ce soir-là, rompue de fatigue physique et mentale, Haya n’avait d’autre aspiration que de sombrer dans un long, long sommeil duquel elle ne sortirait que dans une dizaine d’heures. Mais le sommeil la fuyait avec une persévérance qui tenait du sadisme. Couchée sur son lit, ses yeux grands ouverts fixés sur l’ampoule au plafond, Haya se posait de nombreuses questions sur beaucoup trop de sujets différents. Des images lui revenaient en tête sans qu’elle n’ait plus la force de les analyser consciencieusement : Kinsuke qui se tenait face à elle, l’image de sa sœur, Saeka et Koshiro, quelques scènes de son entraînement du jour, sa mauvaise chute sur le côté, le souvenir de l’eau qui lui coulait sur le dos et sur la poitrine, les jours qui allaient se suivre, le visage d’Encho Daisuke au-dessus d’elle, son regard fou, le pli de ses lèvres, son odeur sauvage, puis ses sœurs et son père. Kade avec une chemise de ninja… c’était difficile à imaginer, même si son père avait toujours eu une physionomie qui s’en rapprochait et…

Haya se réveilla brusquement, en sursautant presque. Elle tendit un long moment l’oreille pour savoir si quelque chose l’avait réveillé, avant de se redresser faiblement les yeux plissés. Le soleil brillait au dehors, pourtant elle ne se sentait pas le moins du monde reposée. Ses derniers rêves se dissipaient totalement, mais elle avait la désagréable impression qu’ils n’avaient pas été sereins. La jeune fille frissonna et sortit de son lit.

Elle portait encore sur elle sa veste d’entraînement, dont l’odeur de transpiration et de saleté lui remonta jusqu’aux narines et la laissa nauséeuse. Haya l’ouvrit et l’enjamba d’un pas fatigué, avant de s’enfoncer dans sa cuisine. Elle prit conscience qu’une faim dévorante la tiraillait et ne se fit pas davantage prier pour mettre à sac ses placards. Un bol de thé vert avec un peu de riz et du saumon (frugal mais efficace) sur les genoux, Haya profitait du soleil sur son balcon. Kiri était réveillé depuis longtemps, même si elle n’avait pas regardé l’heure, Haya devinait qu’il devait bien être onze heures. C’était une curieuse nuit, en réalité, c’était ainsi qu’elle s’imaginait le repos de quelqu’un ivre mort. Avec un néant à la place du repos. Il n’y avait là rien de très agréable et, si elle s’était écoutée, Haya se serait sans aucun doute recouchée.

Mais elle se présenta sans faute auprès de Saeka, qui prenait chaque jour sur son temps personnel pour l’entraînait, et elles passèrent l’après-midi ensemble, quatre jours durant, avec des progrès qui s’avéraient ou étonnants, ou navrants. Mais Haya parvenait à manifester quelque chose qui ressemblait sacrément à une téléportation, bien que ça n’en ait pas encore l’élégance qui lui faisait tellement envie. Saeka sourit.

Saeka - Quand tu prendras confiance en toi, tu auras naturellement ces attitudes un peu… poseurs… qu’ont les ninja qui se téléportent.

Haya - C’est plus épuisant que je ne l’imaginais.

Saeka haussa faiblement les épaules, sans se départir de son sourire.

Saeka - Si ton combat est uniquement orienté sur la téléportation, en effet, tu auras du mal à enchaîner correctement. Mais maintenant, tu as ta chaîne avec toi si jamais tu manquais de chakra.

Les deux jeunes femmes se mirent à marcher sur les berges des lacs. Ryosen et Benihime s’affrontaient pour la énième fois, avec une régularité sans faille. Haya sourit pour elle-même. Ses amis progressaient en même temps qu’elle et sans doute même plus vite encore. En regardant autour d’elle, Haya ne s’en était jamais rendue compte. Mais quelque part, les ninjas, et en particulier la flamme jaune qu’elle fréquentait assidûment, se préparaient à la guerre quotidiennement. Depuis qu’Haya leur avait fait part de ses intentions, qui n’étaient pas des intentions de revanche, pas exactement, l’adolescente avait la sensation qu’ils s’entraînaient avec plus d’acharnement encore. C’était troublant, et Haya n’était pas certaine d’y voir là un reflet de la réalité, ou simplement un effet de son imagination (et dans ce cas, un détestable élan d’égocentrisme). Mais quand elle rencontra le regard de Ryosen, Haya comprit qu’elle ne se trompait pas. Le jeune homme avait les cheveux trempés par une technique de Benihime, et il la retenait d’une main ferme et autoritaire, enfermée contre lui sans pouvoir s’échapper ; pourtant son regard était seulement posé sur Haya. Il lui adressa un mince hochement de tête, avant de repousser violemment sa partenaire pour reprendre le combat.

Haya - Tu m’as dit que Naikin avait demandé à obtenir la flamme jaune quand il était chuunin. Mais qu’on la lui avait refusé parce qu’il n’avait le grade suffisant.

Saeka - Oui.

Haya - Pourtant, il a recruté trois chuunin ensuite.

Saeka acquiesça.

Saeka - Il faut en effet être juunin pour pouvoir commander la flamme. Mais après, le chef de l’équipe a le droit de recruter qui il souhaite du moment qu’ils sont intégrés à l’académie de kiri, même des genins.

L’idée derrière la flamme jaune la fascinait. Les personnes les plus talentueuses d’une génération donnée… mais toujours au regard de celui qui commandait la flamme. Darucha, Kade et maintenant Naikin, les trois chefs historiques de la flamme jaune. Sans doute pouvait-on considérer que Naikin et sa flamme jaune n’étaient pas encore entrés dans l’histoire réellement, mais Haya les connaissait depuis un moment. Quand elle les détestait encore, ce qui l’exaspérait le plus était probablement qu’on disait d’eux qu’ils étaient les plus doués si tôt après la formation de la flamme, qu’ils avaient été les plus rapides à obtenir des résultats concrets. Ils n’avaient pas encore fait des choses gigantesques, leur nom n’était pas encore sur toutes les lèvres… mais après tout, c’était là l’objectif principal de Naikin et un objectif de ce type ne s’atteint pas en quelques mois.

Saeka posa une main sur l’épaule d’Haya.

Saeka - Je ne sais pas exactement qui tu es, ni ce que tu représentes pour eux, mais chéris bien cette amitié Haya. C’est important d’avoir des amis puissants sur lesquels compter. Cela aide… à ne pas prendre de risques inutiles.

La chuunin jeta un coup d’œil en biais à Saeka, qui regardait droit devant elle Benihime et Ryosen s’affronter.

Haya - Merci pour tout Saeka.

Saeka - Je t’en prie. Je vais partir en mission pendant quelques semaines, près du pays du vent. Mais quand je serai de retour, je serai ravie de continuer à t’enseigner quelques mouvements.

Saeka tourna totalement la tête vers l’adolescente.

Saeka - Prends soin de toi et n’oublie pas que tu peux demander n’importe quoi à tes amis, même des choses dangereuses. Si ce sont tes amis, ils sauront ce qu’il convient de faire. Je crois sentir en toi un fort désir de mort, Haya, tu as des ennemis dans ce monde et tu veux les abattre. C’est courageux de ta part, mais prend garde à ne pas blesser les gens qui te sont proches se faisant. Parfois, avec une seule décision, on peut précipiter le destin de beaucoup plus de personnes qu’on ne l’imaginait.

Haya fut surprise du ton très sérieux de Saeka, tempéré par son doux sourire. Elle hocha la tête, la gorge sèche.

Haya - Je m’en souviendrais. Je me suis déjà promis de ne pas les mettre en danger. Je ne suis pas empressée… j’ai attendu cela longtemps… ce sera comme un mécanisme, lent et irréversible. Je tâcherai de ne pas être piégée.

L’entraînement de la flamme jaune semblait terminé. Haya n’entendit plus de mouvements, seulement des voix étouffées par la distance. Saeka lui serra l’épaule brièvement.

Saeka - Tu es quelqu’un de bien.

Haya n’en savait rien. Elle se contenta de détourner le regard vers la flamme jaune, qui scintillait encore faiblement. Benihime faisait la pitre sur le dos de Ryosen, qui maugréait dans sa barbe mais qui portait la jeune femme sans en avoir l’air. Elle ne pouvait pas dire être quelqu’un de bien. Elle cherchait à tuer des gens. Oh, bien sûr, elle pouvait le justifier. Ce n’était pas gratuit. Cela ne déchargeait pas pour autant sa responsabilité. Haya avait déjà tué, ce n’était pas là le problème. Mais elle n’avait encore jamais prémédité une action aussi terrible des mois à l’avance… comme un mécanisme irréversible, oui… Quand elle le mettrait en action, il écraserait tout le monde sur son passage ou se briserait en le faisant. Une entreprise de destruction, nécessaire. Ces meurtres s’étaient décidés il y a plus d’un an. Le jour même où elle survécut au calvaire du cinq décembre. Sa vie rencontra alors kiri et elle emprunta sans même le savoir alors le chemin de son père, puis la mission de son père.

Ils avaient fait d’elle ce qu’elle était. En partie seulement. Haya regardait les gens autour d’elle, Benihime qui lui faisait de grands signes et qui riait aux éclats, tandis que Ryosen ruait à la façon d’un cheval fou. Elle s’était fait des amis. Elle n’était pas devenue l’un de ses quelques spécimens de haine glaciale, tendus vers un but unique et terrible, qui les détruit au passage. Elle ne se perdrait pas en chemin. Elle n’avait pas cette faiblesse… simplement la volonté d’achever cette histoire, de mettre encore une fois chacun face à ses responsabilités. Ils avaient eu l’occasion de la tuer et l’ont manqué. Leurs tortures, leurs violences… cela devait prendre fin.

La main de Ryosen sur son bras la fit sursauter. Le jeune homme haletait de sa brève lutte contre sa partenaire. Il se passa une manche sur la bouche.

Ryosen - Je te prends en charge à partir de demain. On va te former, Haya, et tu deviendras assez forte pour remplir les objectifs que tu t’es fixé. C’est la promesse d’un possédé.
Haya Sasaki

Haya Sasaki


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MessageSujet: Re: Les Possédés   Les Possédés EmptyDim 7 Mar - 22:29

Un instant, Haya avait imaginé prendre quelques jours pour se reposer. Au fil des trois dernières semaines, elle avait travaillé chaque après-midi de chaque jour, avec une régularité d’horloger, et sans aller jusqu’à se dire que c’était exceptionnel, la jeune fille avouait ressentir une certaine fatigue. Au-delà même du physique (qui avait quelques difficultés à suivre, mais qui n’avait pas non plus été trop malmené), c’était surtout une fatigue morale. Haya aspirait à s’aérer un peu les idées, à se promener dans le village et à retrouver une vie sociale un peu plus large.

Mais c’était sans compte Ryosen, qui lui avait donné rendez-vous pour dans quelques minutes à peine. Haya ne songeait même pas à lui demander une petite pause, il prenait sur son temps personnel et sur son entraînement pour l’aider, il était inconcevable qu’elle fasse la fine bouche. Il y avait sans doute là dehors des ninjas qui seraient prêts à tuer (bon, peut-être pas) pour une telle session d’entraînement. Il n’était plus temps de rester à la traîne, elle avait beaucoup de choses à faire et un temps incertain pour les réaliser. Cela était par ailleurs loin d’être impossible, juste un peu pénible.

Haya acheva de se préparer, sa chaîne pendant à son côté. Elle se demandait dans un coin de son esprit si tous les ninjas s’entraînaient autant que la flamme jaune. Sakae avait dit qu’elle avait rarement vu un tel jeu d’équipe, résultat de nombreuses heures passées à s’apprivoiser et à se connaître. Après tout, ils avaient des ambitions précises. Ryosen avait été allusif sur le sujet, il semblait poussé par son propre moteur, et ce serait l’occasion d’en apprendre un peu plus. Pas qu’Haya soit dévorée de curiosité, mais Ryosen l’intriguait, par rapport à ce qu’elle savait sur lui, ce qu’on lui avait dit et ce qu’elle avait compris.

La flamme jaune était au grand complet aujourd’hui. Ils étaient assis dans l’herbe, près des lacs, à l’endroit habituel. Benihime était penchée sur un document, Koshiro discutait avec Naikin et Ryosen méditait tranquillement, en tailleur.

Haya - Bonjour.

Naikin et Koshiro s’interrompirent.

Naikin - Bonjour Haya. On a quelques petites choses pour toi, installe toi.

Benihime releva la tête et tapota l’herbe à côté d’elle. La jeune fille s’assit sur les genoux, les mains posées par terre. Le cœur d’Haya s’accéléra. Avaient-ils appris quelque chose sur Encho Daisuke ? Elle n’était pas sûre d’en avoir envie tout de suite, mais cela ne dépendait pas d’elle.

Naikin - Ryosen a indiqué qu’il souhaitait d’apprendre des éléments particuliers. Et Benihime aussi, une fois que Ryosen en aura terminé. Ceci nous semble très important. Quelle que soit la route que tu emprunteras, il te faudra être forte.

Haya écoutait en silence, sans quitter des yeux Naikin, qui s’exprimait lentement et avec le plus grand sérieux.

Naikin - Nous avons demandé une autorisation spéciale pour fonctionner à trois seulement pendant quelques semaines. Dans un premier temps, Ryosen restera derrière pour s’occuper de toi, puis Benihime. Je pense qu’il faudra un mois à ce rythme pour arriver à de bonnes choses. Qu’est-ce que tu en dis ?

Haya - C’est super ! Je sais pas quoi dire… merci… ça ne vous ennuie pas ?

Naikin - Nous avons attendu longtemps que tu nous demandes notre aide. Ce n’était certainement pas une promesse en l’air. Ne te soucies pas du temps que cela nous demande, on s’arrange très bien.

Haya fit le tour des personnes autour d’elle. Benihime, qui s’était replongée dans son document, ses sourcils clairs joliment froncés. C’était peut-être la personne de laquelle elle s’était le plus rapprochée au fil des mois, et pourtant cela n’avait pas exactement bien commencée. Elle l’avait toujours détestée à l’académie. Avec ses grandes mèches blondes, son air méprisant, ses plaisanteries de mauvais goût… tout ce qu’elle appréciait chez elle aujourd’hui, et bien plus encore. Les deux filles avaient partagé des moments rares, comme lorsqu’elles étaient retournées à son village natal et que Benihime était venue la serrer dans ses bras, le plus naturellement du monde. Ryosen, les yeux clos qui faisait probablement semblant de méditer, et qui lui apparaissait comme une personnalité aux facettes multiples. Il s’était dit aussi possédé que son père, mais d’un démon différent. Un démon qui le poussait à travailler, à se dépasser… Koshiro avec qui elle n’avait pas beaucoup partagé, mais qui s’était arrangé avec sa petite amie pour l’entraîner pendant trois semaines, afin qu’elle aussi se dépasse. Et Naikin, animé de ses propres ambitions et désirs, qui souhaitait faire la lumière sur un nom entaché d’injustice… celui de son père, Kade Kasen.

Haya - Merci beaucoup…

*****

Haya se gratta la tête.

Ryosen - Bon… c’est pas trop mal.

La jeune fille se redressa et épousseta ses vêtements. Les muscles de ses jambes commençaient à s’ankyloser à force d’inaction. Cela faisait quatre heures aujourd’hui qu’elle essayait de tracer un sceau correct, et ce n’était jamais que le cinquième jour qu’elle essayait. Pas trop mal était encore un peu trop mauvais à son goût, comme observation. Elle jeta un regard critique à son sceau qui, s’il s’était relativement bien tracé, ne disposait pas d’assez de chakra pour disposer du moindre effet réel. Néanmoins, elle respectait en cela les indications que lui avait fourni Ryosen (ne te préoccupe pas du chakra, mets ce qu’il te faut pour tracer). Peut-être était-il temps de passer à l’étape supérieure ?

Elle rejoignit le jeune homme, adossé au tronc d’un arbre à quelques mètres de là. Haya baissa les yeux sur le cercle qu’il avait lui-même tracé pendant qu’elle s’exerçait : mieux défini et avec un noir plus profond et presque luisant, mais la forme était grandement similaire. Un bon point, sans doute, pour elle. Haya s’installa à ses côtés, ses jambes sous elle. Ils demeurèrent silencieux un moment. Au loin, on pouvait entendre Benihime qui criait (cela lui arrivait souvent quand elle s’entraînait) et des coups sourds, réguliers, qui provenaient certainement des propres travaux de Koshiro. Saeka, comme prévu, était partie en mission à présent, pour une durée qu’Haya ne connaissait pas.

Haya - Saeka m’a dit que tu connaissais Benihime depuis longtemps.

Ryosen - En effet. Je la connaissais avant qu’on ne s’inscrive à l’académie.

Comme à son habitude, Ryosen se montrait suffisamment poli pour lui répondre, mais il ne poussait jamais le vice jusqu’à lui faire la conversation. Haya sourit et ramena ses jambes à elle. Il y a quelques mois, Ryosen et Benihime étaient les deux personnes qu’elle détestait le plus dans tout kiri. Aujourd’hui, elle se sentait enveloppée d’une espèce de voile de confiance quand elle était en leur compagnie et cela même si Ryosen n’y mettait pas particulièrement du sien. C’était quelque chose qui se sentait plus qu’il ne se prouvait. L’attachement de Ryosen pour elle, ou pour son père elle ne savait pas très bien, transpirait avec subtilité de chacune de ses paroles et de chacun de ses gestes. Haya n’avait pas eu l’occasion de détester beaucoup de personnes dans son enfance, tout au plus ne s’était-elle pas intéressée à tout le monde dans son village natal. Mais de là à les détester… à kiri les choses avaient changé. Il y avait plus de monde, d’une part, mais également des personnalités qui lui faisaient horreur. Partout où elle posait le regard, et elle y fut très sensible lors des premiers mois qu’elle passa à kiri (des mois peu reposants par ailleurs qui lui firent connaître les couloirs de l’hôpital plus que tout autre chose), il y avait cette arrogance. Parfois sereine, d’autre fois très agressive, une bonne frange de ninjas se complaisait dans l’arrogance de leur propre art. Il arrivait que cela soit totalement justifié, mais ça restait agaçant.

Haya essayait de se souvenir pourquoi elle les détestait… ce n’était pas quelque chose dont elle avait fait l’expérience. Pour elle, à cette époque, la flamme jaune c’était uniquement ce qu’on racontait d’eux et ce qu’elle pouvait voir de ses propres yeux. Mais cela restait un préjugé, globalement très négatif, et non un savoir réel. Quand elle les avait approchés, tous ses préjugés prirent une coloration de vérité. Ils étaient bien aussi arrogants qu’elle le pensait, et cruels avec ça. Ils l’avaient presque tuée alors, comme une quantité négligeable. Haya s’était cependant accrochée avec la toute dernière énergie, jusqu’à être tolérée et acceptée, pour tout un tas de raisons dont elle n’avait à l’époque pas conscience, notamment le fait d’être la fille d’une triste célébrité, intimement liée à la flamme jaune. Et maintenant… elle les aimait, dans le sens où il y avait entre eux des notions de partage, de soutien, de confiance et d’amitiés, des notions qui ne sont pas aussi courantes qu’elle l’aurait pensé dans le monde ninja. Après tout, Haya avait assisté à une guerre civile, mais aussi à ses complications et ses imbrications futures, comme le procès de Nezu dont on commençait à parler sous le manteau. Cela lui restait un peu étranger…

Ryosen - Elle était vraiment jolie. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je lui parlais. Mais elle était encore plus chiante qu’aujourd’hui. Je te laisse imaginer.

Haya se tourna vers lui, un peu décontenancée peut-être (Ryosen la faisait mentir et entreprenait justement de lui faire la conversation !) mais souriante à l’idée d’une petite gamine pénible à souhait. Etonnamment, imaginer la Benihime de maintenant dans cette configuration n’était pas très dur. Il suffisait de la rapetisser, de lui mettre de jolies couettes blondes et une petite robe, de la visualiser courir partout et rire comme une petite fille joueuse.

Ryosen - Moi je voulais devenir ninja depuis longtemps, mais elle me disait que c’était un travail d’imbéciles. On n’arrêtait pas de se battre à se juger. Bien sûr, je gagnais tout le temps et cela n’a absolument pas changé aujourd’hui, contrairement à ce que pourrait suggérer la propagande fallacieuse de Benihime.

Haya - Bien sûr.

Le jeune homme se redressa contre le tronc et ferma les yeux.

Ryosen - Mais quand je suis entré à l’académie, elle m’a suivi. Et elle s’est montrée douée, même si nos voies ont divergé quand on est passé genin.

Haya - Tu sors avec elle ?

Ryosen lui adressa un regard sombre qui la fit sourire plus qu’autre chose. Elle avait au moins une partie de réponse.

Ryosen - Je ne réponds pas aux questions déplacées.

Haya - Désolée.

Haya releva la tête vers le ciel. C’était un coin tranquille, où ils étaient le plus souvent seuls. En réalité, Haya suspectait le tout kiri de savoir que cet emplacement était l’endroit préféré de la flamme jaune et qu’en tant que tel, mieux valait l’éviter. Haya se souvenait qu’elle avait failli mourir pour la seconde fois ici, n’en déplaise à Benihime qui lui assurait qu’elle ne risquait rien de (trop) grave. Cela faisait des souvenirs… Mais ce beau ciel, tour à tour bleu ou gris selon le temps qu’il faisait, entrecoupé des tâches sombres des quelques arbres qui poussaient alentour… et ces vastes lacs, peu profonds pour la plupart d’entre eux, du moins sur ce versant, qui scintillaient ou se teintaient d’une sinistre lueur noire… un bel endroit.

Ryosen - On ne sort pas ensemble. Tu me fais flipper quand tu dis plus rien, je préférais quand tu étais muette pour de bon. On est sorti ensemble quand on était plus jeunes, vers quatorze quinze ans. Mais elle était trop chiante. Et on n’a pas des caractères qui se… hmm… fondent l’un dans l’autre. Ils se confrontent, ils s’électrisent, ils se collent et se repoussent… c’est bien pour une amitié terrible, moins pour un amour.

Il renifla.

Ryosen - Aujourd’hui il nous arrive de nous retrouver… mais on se considère comme deux bons amis avant toute chose.

Il haussa les épaules et retomba dans le silence, l’air de dire que c’était sans importance. Haya s’était souvent demandé qu’elle était la différence entre les personnes qui étaient nées dans un village tel que kiri, et ceux qui venaient pour y apprendre. Il y avait à kiri des générations entière de ninjas, qui prenaient tous cette voie sans se questionner. Mais il y avait aussi ceux qui commençaient de nouvelles générations, voire aussi ceux qui ne faisaient jamais qu’ouvrir une brève parenthèse dans la vie du village… la situation d’Haya était peut-être un peu mélangée. La mère de son père, sa grand-mère donc, dont elle n’avait jamais véritablement entendu parler hormis très brièvement dans le récit de Tsuna, était venue mourir à kiri. Elle y avait laissé son enfant, Kade, qui a ainsi pu devenir celui qu’il est devenu : un puissant ninja, chef de l’unité de la flamme jaune, espoir de tout un village mais tourmenté par ses propres faiblesses. Puis il était parti, et la parenthèse Kasen semblait définitivement fermée, du moins en apparence. Car si la mission de Kade avait été un succès… Haya fut prise d’un vertige.

Si la mission de Kade avait été un succès, cela n’aurait absolument rien changé. Il n’aurait jamais réintégré kiri. Il serait resté le déserteur honni qu’il était. Satoshi le lui avait dit : si le daimyo apprenait que kiri avait manigancé, de près ou de loin, la chute de Nagata Hideyoshi, le village était perdu et voué aux ténèbres. Cela dépassait le cadre d’une guerre civile au sein du village, ils risquaient l’embrasement de tout le pays, comme par le passé avant que la loi d’uke ne soit appliquée. La personnalité de Nagata n’importait pas, il pouvait être aussi cruel et inique qu’il le désirait, kiri avait l’interdiction formelle d’intenter la moindre action qui lui serait préjudiciable. Une loi nécessaire, mais qui trouvait ses failles dans la nature même de l’homme. Elle était trop facile à détourner, à pervertir, et Nagata ne s’en était pas privé. Il pouvait ainsi se dresser silencieusement contre la loi d’uke, sans que kiri n’ait les moyens officiels d’agir, à cause de cette même loi d’uke… Si son père avait tué Nagata, le danger aurait été écarté, la mission accompli, mais Kade serait resté l’homme à abattre bien que kiri, du moins Haya l’espérait-elle, n’y aurait jamais mis les moyens nécessaires et aurait contribué à protéger Kade. Qu’est-ce qui pouvait pousser un homme à tout abandonner ainsi à un village qui ne représentait rien d’absolument vital pour lui ? Kade n’était pas né à kiri, il y avait immigré de force et il était devenu ninja sur le tas. Quel était son attachement réel, la raison de ses actions, de cette prise de risque énorme ? Haya s’était toujours refusée à juger son père, à lui en vouloir de manière puérile, mais c’était là le point qu’elle n’arrivait pas à s’expliquer. Est-ce que son amour pour le village, un amour qu’elle ne comprenait pas, était plus fort que son amour pour ses filles, ou bien y avait-il une donnée qui lui échappait ? Haya avait vu de ses yeux des ninjas qui n’hésiteraient pas un instant à sacrifier femme et enfants pour le village. Mais se dire que son père était de ceux-là, ce n’était définitivement pas aisé. En attendant d’avoir une preuve formelle, Haya s’y refusait.

Ryosen - Je t’ai déprimé avec mon histoire?

Haya - Non je pensais à mon père.

Ryosen - Ah… Cela va être déplacé si je demande à quel sujet.

Haya sourit et baissa les yeux sur Ryosen.

Haya - Je me demandais s’il préférait kiri à nous. Je n’arrive pas à me décider.

Ryosen - Tu y arriveras plus tard, si tu y tiens. Mais, si je peux me permettre, je crois bien qu’il vous aimait infiniment plus qu’il n’aurait jamais pu aimer kiri ou quoi que ce soit d’autre.

Haya cligna des yeux, stupéfaite.

Haya - Qu’est-ce qui te fait dire ça ?

Le jeune homme eut une moue un peu gênée, mais il poursuivit néanmoins sa pensée.

Ryosen - Il vous a tenu éloignées de kiri et à mon avis, il aurait préféré que tu n’y mettes jamais les pieds. Kade… devait avoir un sens de sacrifice énorme. Il s’est sacrifié pour le village, afin de tuer Nagata. Mais il s’est sacrifié pour vous, afin que vous n’intégriez jamais kiri. Je ne sais pas pourquoi il agissait comme ça. Mais à mon avis, il n’y a aucune comparaison entre son amour pour le village et pour vous. Ce sont… deux mondes différents.

Haya - J’aimerais que ce soit vrai, même si c’est idiot, murmura-t-elle tout bas, les cheveux devant les yeux.

Ryosen tapa amicalement sur sa cuisse, manquant la faire sursauter.

Ryosen - Ce n’est pas tout, mais on a du travail devant nous. Ca te changera les idées, quand tu seras toute transpirante d’effort !
Haya Sasaki

Haya Sasaki


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MessageSujet: Re: Les Possédés   Les Possédés EmptyLun 8 Mar - 21:38

La lumière, d’un rouge aveuglant, s’atténua progressivement avec une paresse empruntée.

Haya souriait de toutes ses dents, quoiqu’un peu chancelante, alors que Ryosen soufflait sourdement face à elle, le poing tendu. Il finit par se redresser, la lueur rouge s’était à présent dissipée en totalité et Haya en profita pour se rééquilibrer. Elle n’avait pas été projetée en arrière, mais cela avait été davantage un réflexe qu’autre chose d’anticiper le choc… qui n’avait pas eu lieu. Ryosen agita sa main et la serra brièvement à trois reprises, comme pour vérifier que chacun de ses os répondait présent.

Haya - Tu as mal ?

Ryosen - Hmm, pas plus que quand on tape un mur.

Haya rit de bon cœur.

Haya - Quel homme ! Tu dis ça avec un naturel…

Enivrée par sa réussite, Haya se sentait un peu plus légère que les jours passés. Comme souvent quand on assiste aux résultats d’efforts acharnés et harassants. Elle avait même l’impression d’avoir un peu bu, tout étourdie qu’elle était de sa propre joie et du coup de Ryosen. Haya regarda ses bras avec un émerveillement de petite fille. A partir de son coude et cela sur chaque bras, deux traits noirs glissaient jusqu’au dos de ses mains et teintaient d’un noir puissant son annulaire et son index. Elle gratta la surface de l’ongle, sans que cela n’affecte en rien la prégnance du sceau. Elle trouvait cela joli (les ninjas pourraient dire ce qu’ils voulaient, la plupart faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour soigner leur esthétique, elle en avait les preuves), pour avoir vu des sceaux autrement plus invasifs et laids. Cela lui donnait même un certain style.

Elle releva la tête vers Ryosen, qui la dévisageait en souriant.

Ryosen - Hé bien, tu fais plaisir à voir. J’ai l’impression de t’avoir offert un gros gâteau fait maison.

Haya - J’adorerais que tu me fasses un gros gâteau.

Ryosen leva une main apaisante.

Ryosen - Crois-moi, tu n’adorerais pas tant que ça.

Il lui fit signe de le suivre. Ils étaient seuls cette fois-ci, tout le monde était en mission. La flamme jaune opérait comme elle l’avait signalée, avec seulement trois éléments au lieu des quatre initiaux. Haya se sentait toujours un peu gênée à l’idée de leur prendre autant de temps et de les empêcher de travailler réellement ensemble, mais ils s’y prenaient de telle sorte à ce qu’elle ne se sente jamais en trop. Cela faisait près de quatre semaines qu’elle travaillait aux côtés de Ryosen, ce qui leur faisait un peu dépasser les estimations de départ. Normalement seules deux semaines avec Ryosen auraient dû être nécessaires, mais il disait que cela ne servait à rien de se presser et qu’ils devaient suivre son rythme à elle. Les sceaux étaient un univers complètement nouveau pour elle, Haya en ignorait jusqu’à l’existence le mois dernier. Alors cela lui avait demandé un certain temps d’adaptation pour se faire à ce maniement particulier et à la philosophie si unique qui était la leur. En effet, c’était beaucoup sur la prévision plutôt que sur l’instantanéité. L’objectif n’était pas tant de réagir directement aux actions et aux stratégies d’un adversaire, mais plutôt de se préparer à ces stratégies, les anticiper pour se tenir prêt. Haya trouvait cela fascinant. On pouvait choisir de marquer son corps de différentes façons, selon ce qu’on craignait le plus ou ce qu’on désirait éviter, ou renforcer.

Joukaku… elle adorait son nom.

Ils s’installèrent près du lac, assis l’un contre l’autre le regard tourné vers l’étendue sereine des eaux. Haya retira ses bottes, remonta son pantalon sur ses genoux et étendit les jambes dans l’eau claire, les mains enfoncées dans le sable, un sourire fin aux lèvres. Ryosen, sobre, se tenait sur un coude et rajustait sa cravata blanche d’une main distraite, le regard absent posé sur les jambes d’Haya sans qu’il n’y fasse véritablement attention.

Haya - Cela ne te manque pas de ne pas être partis avec les autres ?

Ryosen - Non, c’était une mission barbante. Benihime me suppliait de finir ton entraînement à temps pour que ce soit elle qui reste et moi qui aille m’ennuyer.

Ryosen lui jeta un coup d’œil.

Ryosen - Ils ne risquent rien sans moi, ne t’en fais pas. Je sais que je suis irremplaçable et que mon intellect tonique leur manquera, mais ils feront avec, j’imagine.

Haya sourit. La vie des ninjas était très stressante en réalité. La plupart des gens se font quotidiennement du souci pour leurs proches, mais comme une routine, sans urgence. Pour les ninjas, cela revêtait un caractère plus vif et piquant. Sans craindre chaque heure de chaque jour de recevoir une note pour informer du décès de telle ou telle personne, Haya ne parvenait à totalement l’écarter de son esprit. Cela l’obligeait à faire confiance aux gens, ce que lui reprochait Kinsuke quelques mois plus tôt. Il l’avait gentiment grondé alors, et Haya avait le sentiment d’avoir corrigé son attitude avec les personnes qui l’entouraient. C’était agréable de pouvoir se reposer sur des gens amicaux et d’avoir la certitude de tout faire pour les supporter d’un mouvement égal.

Ryosen - Tu es une belle fille.

Il secoua la tête, sans se soucier du regard déconcerté d’Haya qui ne savait pas bien quoi dire.

Ryosen - Forcément Kade te préférait à kiri… j’y ai repensé hier.

Haya - Et tu en es arrivé à quelle conclusion ?

Ryosen - Juste celle là. Kade vous préférait à kiri.

Haya fit jouer ses orteils dans l’eau, puis les enfouit dans le sable humide. Elle était sûre de connaître son père, malgré ses petits mensonges. Son visage tranquille, la façon dont il la serrait dans ses bras, les histoires qu’il lui racontait le soir, les promenades qu’ils faisaient tous ensemble, ses excuses quand il était en retard… tout cela ne pouvait pas être faux. Et toutes les histoires qu’elle avait lues et entendues sur son père… elle savait que c’était des mensonges. Tsuna lui avait raconté toute l’histoire et elle n’avait aucune raison de lui mentir. Pourquoi l’aurait-elle fait ? Haya avait compris que Tsuna était sincèrement attachée à son père, et qu’elle avait souffert de ce sacrifice. Suspecter Tsuna revenait à suspecter tout le reste, et Haya préférait accorder sa confiance plutôt que ses doutes. Cela lui semblait plus généreux et, pour cette fois au moins, sûr et sans danger.

Haya - Je ne comprends pas bien ta relation à mon père. Avec Naikin, tu sembles être le plus… attaché, à son image.

Ryosen garda le silence un long moment. Il se coucha sur le dos et posa son bras sur ses yeux pour les protéger du soleil juste au-dessus d’eux. La façon dont il parlait de son père l’avait toujours impressionnée, avec un mélange indéfinissable dans la voix et dans les gestes. Il s’était proposé de lui-même pour l’accompagner à Mako, son village natal, pour revenir sur les lieux de la tragédie. Haya avait toujours eu l’impression qu’à travers elle, Ryosen aidait son père, ou l’image de son père comme elle l’avait dit, sans que cela ne remette l’attachement à son égard. Haya lui avait dit que d’eux tous, c’était lui qui voulait le plus la voir aboutir… Et qu’ils étaient prêts à mourir pour elle…

Ryosen - Quand j’étais enfant… et adolescent d’ailleurs, j’aurais voulu qu’il soit mon père, finit-il par murmurer.

Il souriait.

Ryosen - C’était un peu mon héros. Il avait un cran… exceptionnel. Je me souviens qu’à l’académie, on se racontait tous ses exploits, dont la plupart devaient être complètement inventés d’ailleurs. Mais il était très populaire. Pourtant il ne faisait pas grand-chose pour, c’était un véritable salaud. Sans vouloir te manquer de respect. Il était haï et adoré à la fois, c’était ce que je voulais être plus tard. J’avais l’impression que c’était la véritable liberté.

Il retira son bras de devant ses yeux et poussa un long soupir.

Ryosen - Quand il a déserté, ça a été un choc. Pas seulement pour moi, pour tout le village. Tout d’un coup, l’équilibre a été rompu : la haine a pris le dessus sur l’admiration sans borne qu’on lui vouait, et le village l’a haï pour ce qu’il avait fait. Mais pas moi. Moi je l’adorais toujours, même s’il m’avait déçu. Pour le village, c’était vraiment un coup dur. Vraiment. Déjà, son équipe la plus efficacité était démantelée en l’absence de son chef. Plus de flamme jaune, encore une fois. Ce souvenir du choc de la désertion monstrueuse de Darucha, qui a exécutée sa propre équipière comme une bête, a été de trop. Le souvenir des actions extrêmes de Kade, son nationalisme nauséabond… tout cela a contribué à sa chute. Kiri avait besoin de le haïr autant qu’il l’avait aimé, pour trouvé la force de garder la tête haute. C’est vraiment une histoire de kiri, ça.

Le ton de sa voix avait quelque chose de très perturbant. Haya sentait que Ryosen ne parlait pas d’un héros du passé, de son enfance, mais bien d’un père qu’il aurait perdu. Il n’avait pas le droit de penser cela. Ce n’était pas lui qui avait perdu son père, mais elle. Haya se réprimanda mentalement. Elle n’avait pas le droit de penser cela non plus. Du bout des doigts, elle toucha la main de Ryosen et resta là, plus troublée qu’elle ne voulait bien se l’avouer. Tous ces gens aussi avaient connu son père… et dans la voix de Ryosen, Haya ressentait tout son amour, avec toujours cette subtile nuance de déception, même après qu’elle lui ait raconté toute la vérité sur la vie de son père. Un peu comme ce qu’elle aurait dû ressentir, avoir l’impression d’être une fille trahie. Mais Haya ne pourrait jamais se pardonner une telle pensée. Ce serait cracher sur le sacrifice de son père, mais aussi sur tout ce qu’ils avaient partagé, sur leur passé… elle ne pouvait pas, sous prétexte qu’elle était la survivante de la famille, tout ramener à elle et s’approprier leur histoire. Kade ne l’avait pas trahi, et il avait dû souffrir bien plus que la mort au moment de relâcher son dernier souffle, dans l’incertitude quant au destin de ses filles.

A raison.

Ryosen - J’avais travaillé dur pour lui ressembler. Tu vas trouver cela imbécile, mais je me suis engagé dans la médecine dans le but de revenir à l’origine de la flamme jaune, à l’image de Darucha le médecin, avant la corruption. Je voulais être toute l’essence de la flamme jaune à moi tout seul… je rêvais de travailler avec ton père. Plus qu’un rêve, c’était une obsession. Je ne peux pas te rendre compte du travail que j’ai fourni. C’était colossal. J’ai travaillé avec une rage de réussir énorme. Kiri m’a proposé de devenir juunin, mais je leur ai dit que tant que je n’aurais pas le niveau pour travailler avec Kade Kasen, je ne pouvais être digne de cette nomination. Aujourd’hui, bien, je suis resté chuunin…

Il posa sa propre main sur celle d’Haya, qui s’immobilisa, et la caressa doucement.

Ryosen - « Un travail acharné vient à bout de tout »… c’est ce que je t’ai dit et ça a toujours été ma devise depuis ces premières ambitions. Mon travail acharné, désormais, vise à te rendre ce qui te revient de droit : la paix. Ne me juge pas trop durement, mais j’ai l’impression de… je vais être un peu maladroit, mais de travailler enfin au niveau de ton père, d’être un peu… à ses côtés. Mais attention, je ne te prends pas pour Kade ! J’aime juste l’idée qu’il n’a pas été totalement détruit et qu’il m’a été confié l’opportunité de lui rendre un service, un dernier service : te garder en vie, serait-ce au péril de la mienne. Tu es mon travail acharné, Haya. Tout cela sert enfin à quelque chose. C’est la possession dont je te parlais. Le travail, ton père, puis maintenant toi. Je suis possédé par tout cela.

Haya ne réfléchit pas véritablement lorsqu’elle se pencha sur Ryosen et posa ses lèvres sur les siennes. Elle n’appuya pas de beaucoup, son visage glissa sur le sien et elle se cala tout contre lui sans qu’il ne bouge. Ses jambes remontèrent jusqu’à celles du jeune homme, ils restèrent là sans plus parler, immobiles à respirer les douces odeurs humides du lac. Haya ferma les yeux et peut-être qu’elle s’endormit un peu, comme pour partager ses rêves avec un autre possédé.

[Fin.]
Iba Hiyori

Iba Hiyori


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MessageSujet: Re: Les Possédés   Les Possédés EmptyMer 21 Avr - 1:07

Pauvre Kinsuke. Avec une fin pareille, il a de quoi être dépité le garçon Very Happy

Encore une fois certaines répliques sont monstrueuses (le coup du gâteau, le combat de Benhime pour aller ... manger). On est pas loin du "Yomi est humaine, pas moi". La Flamme a l'air bien vive, je me demande quels seraient les builds RPG (cela me titille Smile)

Comme toujours, je n'ai pas été déçu, loin de là.

Haya : + 142 XP

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