4 – La réponse est 49

(Demande de validation d'entraînement : Dextérité)

Hana marchait sur les berges de ce que les habitants de Konoha nommaient pompeusement un lac, et qu’on aurait eu, les jours de sécheresse, du mal à distinguer d’une simple flaque d’après averse. La seule chose qui rattachaient ce… lac… à un véritable Lac était la présence, en son fond, d’une arborescence de filaments végétaux ondulants, auquel Hana se référait habituellement par un simple : « Putain d’algue de merde qui s’accrochent partout fais chier merde en plus ça colle c’est dégueu ah bordel mais sortez moi de là ! ».

Hana aimait la simplicité.

Elle repéra un petit caillou aplati qui convenait et, le ramassant, le laissa tomber dans la petite sacoche en tissu qu’elle tenait dans la main gauche. Un tintement rocheux se produisit lorsqu’il heurta la vingtaine de galets qu’elle avait déjà récolté.

C’était encore loin d’être suffisant.

Passer une heure à ramasser des galets en étant particulièrement élitiste quant aux choix des rares élus admis dans la besace avait essentiellement un avantage, et un désavantage.

Avantage : Hana avait le temps de réfléchir.

Désavantage : Elle se faisait chier comme un rat mort.

Le pire était probablement qu’elle ne comprenait pas POURQUOI elle devait faire ça…

[La Raison] Si Chikara t’a demandé de faire ça, il y a forcément une utilité !

[La Curiosité] Et tu veux savoir ce que c’est, hein petite ?  Alors ramasse !

[Hana] Ouais… nan… mais ouais… mais c’est chiant…

[Tous] TA GUEULE ET RAMASSE !

Désertée de tous, même de ses voix intérieures, Hana reprit son travail en maugréant, jusqu’à avoir récolté une petite cinquantaine de galets. La sacoche lui faisait à présent l’effet d’être un véritable enclume soudée à son bras, et chaque pas lui donnait l’impression d’aggraver encore un peu la scoliose à triple hélices inversées qu’elle se cultivait depuis qu’elle avait commencé.

Enfin, elle laissa tomber la besace, et prit un instant pour regarder les berges du lac. Si elle s’était sentie d’humeur poète, elle aurait probablement remarqué le vol bas et souple des oiseaux, la courbure rythmée, tout en danse et en esquive, des roseaux sous le vent, et peut-être même deux ou trois fleurs pas trop dégueulasse, mais les choses étaient ce qu’elles étaient : Hana n’avait absolument pas la moindre once de sensibilité à la poésie à cet instant précis.

Elle n’avait pas le temps pour ça. Elle devait faire des ricochets.

Chikara Aisu avait cette capacité formidable – et inégalée – à donner les exercices les plus stupides du Pays. Du moins en apparence. Après des heures et des heures à répéter en boucle les exercices qu’il lui proposait, Hana finissait par réaliser que ses exercices n’étaient clairement PAS les plus stupides du Pays. Ils étaient les plus cons du Monde. Et de loin.

Faire des ricochets ? Sérieusement…

[Raison] Il a pas tort ! Ca va t’entraîner à plein de choses ! La précision ! L’équilibre !

[Humour] Le porté de galet !

[Raison] La patience !

[Hana] Ca va, ca va, j’ai compris !

Elle saisit le premier galet, et le lança, droit et net, sur la surface du lac. Il y eut un gros PLAOUWF vexant, et le galet sombra sans même se donner la peine de rebondir une fois ou deux. Hana soupira. Après s’être donné tant de mal à ramasser tout ces galets, la moindre des choses aurait été qu’ils lui rendent un peu la pareille en y mettant du leur !

[Culpabilité] Tu sais pas… Peut-être qu’ils ne voulaient pas que tu les déplaces. Peut-être que tu les as séparé de leur femme, de leurs enfants… De leur chien !

Silence.

[Raison] J’appose mon veto.

[Curiosité] Pas mieux.

[Humour] Yep.

[Amour immodéré des pâtisserie au miel] La même.

[Mémoire] Tu n’as lancé qu’un galet…

Hana leva les yeux au ciel, et prit un second projectile. Elle ajusta son tir, retint sa respiration, et lança à nouveau, encore plus droit, encore plus net, en tâchant de son mieux d’arrondir le poignet pour faire tourner le galet aussi vite que Daiisu – sa sœur aînée – rembarrait des amis potentiels.

PLAOUWF.

[Low Self Esteem] Et c’est l’écheeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeec !

Hana secoua un peu la tête pour faire tomber la petite voix un peu plus profondément. Elle aurait le temps pour ça. Son regard tomba sur les quarante-sept projectiles qui lui restaient à lancer. Elle trouverait le temps pour ça…

Peut-être même qu’elle trouverait le temps – en les lançant – de se demander POURQUOI elle n’avait ramassé que quarante-neuf galets.

Ou peut-être pas.

Après tout, qui peut savoir ?